• « Le Justicier, enquête sur un Président au-dessus des lois »

    Falcon Oil Compagny,....ça vous dit quelque chose?

    ....une grande grande compagnie d'exploitation du pétrole en Afrique...!

    Falcone , Pierre Falcone c'est aussi le nom d'un ami de nos gouvernants

    Falcone c'est aussi le nom d'un taffiquant d'arme arrêté.....


        JUSTE UNE PRECISION:


    c'est bien du même Falcone qu'il s'agit..si, si!!!


    ( description extraite de fr.wikipedia.org/wiki/Pierre_Falcone:
    [...] Pierre Falcone est au centre d'un trafic d'armes vers l'Angola en 1993-1994 sous ....pays [..] Pierre Falcone a créé aux États-Unis une société Falcon Oil & Gas )


    Voyez, vous-même, quelles sont  ses relations avec super sarkozy...l'ami des maffieux et de la Françafrique.


    voir un article paru courant 2011 : http://www.rue89.com/


     Rue89 publie les bonnes feuilles de l'excellent 
    « Le Justicier, enquête sur un Président au-dessus des lois »
     de la journaliste de l'AFP Dorothée Moisan,
    qui sort ce jeudi aux éditions du Moment.
    En 1993, l'Angola est dévasté par l'une des guerres civiles les plus sanglantes du XXe siècle. Le président José Eduardo Dos Santos cherche à acheter des armes pour terrasser les rebelles de l'Unita. La France refuse. Il contacte alors Pierre Falcone.
    Aux côtés de son associé israélien d'origine russe, Arcadi Gaydamak, l'homme d'affaires procure à l'Angola, sans l'aval de la France, chars, navires, obus et hélicoptères dénichés dans l'ex-bloc soviétique. Montant de ces ventes sur cinq ans : 790 millions d'euros.


    Pour favoriser leur trafic, Falcone et Gaydamak auraient, selon l'accusation, 
    "Le Justicier" de Dorothée Moisan.
    arrosé en cash leurs obligés français, dont l'ancien ministre Charles Pasqua et son ami Jean-Charles Marchiani, et versé de substantiels pots-de-vin à une trentaine d'officiels angolais, au premier rang desquels le président Dos Santos.
    En 2000, la France ouvre une enquête sur ces ventes qu'elles soupçonnent illégales. Elle est confiée aux juges Philippe Courroye et Isabelle Prévost-Desprez qui à l'époque travaillent main dans la main. Aucun Angolais ne figure parmi les mis en examen, mais l'homme fort du pays n'apprécie guère d'être dépeint par les enquêteurs français comme un contrebandier corrompu. Pas plus qu'il ne goûte la mise en cause de son intermédiaire providentiel, Pierre Falcone.
    Pour Luanda, il y a eu feu vert de Paris et il s'agit de ventes d'armes régulières à un Etat légitime et souverain. Point final. Piqué, Dos Santos rompt toute relation avec Paris. Et, en 2003, il nomme Pierre Falcone ambassadeur de l'Angola auprès de l'Unesco. Une manoeuvre qui lui permet de le protéger juridiquement.

    Sarkozy en Angola pour Total, Bolloré, Bouygues et Areva

    Dès son élection, Nicolas Sarkozy tente de renouer le contact. Pas question de se brouiller avec le premier producteur d'or noir de l'Afrique subsaharienne, surtout quand Total est le deuxième opérateur pétrolier en service dans le pays.

    En novembre 2007, Claude Guéant joue les éclaireurs auprès de Dos Santos. Il ouvre le chemin à son champion. Le 23 mai 2008, Nicolas Sarkozy fait dix-sept heures d'avion pour rester cinq heures à Luanda, avec dans ses valises les patrons de Total, Bolloré, Bouygues ou encore Areva : c'est la première visite d'un président français depuis dix ans. Un événement. Les deux chefs d'Etat se félicitent d'avoir tourné « la page des malentendus du passé ». Face à la presse, pas un mot sur l'Angolagate. Pourtant, la rencontre entre les deux dirigeants n'a tourné qu'autour du procès prévu en octobre.

    La réconciliation porte rapidement ses fruits. Mi-juillet, le ministre de la Défense Hervé Morin envoie aux avocats de Pierre Falcone une lettre susceptible de faire capoter le procès. Les armes n'ayant pas transité par le territoire français, écrit le ministre, aucune autorisation n'était nécessaire. Et sans infraction, pas de procès !

    Alors que le dossier s'est construit sur une plainte du ministère de la Défense, la même autorité vient soudain dire : « Circulez, y a rien à voir. On n'a plus rien à vous reprocher. » On a rarement vu intervention politique plus explicite.

    Pierre-François Veil, qui conseille Falcone, se rue alors triomphant dans le bureau du juge Jean-Baptiste Parlos. « Il n'y a plus de procès ! » jubile-t-il. C'est mal connaître le président de la 11e chambre, un magistrat courageux que la raison d'Etat n'effraie pas. En dépit de pressions peu discrètes de l'Angola, voire de filatures, celui-ci tient bon et écarte la lettre du ministère. Le procès de l'Angolagate s'ouvre le 6 octobre 2009.

    Le « laisser-faire » de la France pour protéger « ses intérêts »

    Survient la seconde offensive. Sur un ton menaçant, l'Angola réclame l'arrêt du procès et la restitution de toutes les pièces du dossier, en vertu du secret-défense. En vain.

    Enervé du ton adopté par l'avocat de Luanda, le président Parlos s'enquiert même publiquement de savoir si « les juges seraient inquiétés » par les autorités angolaises et fait acter la réponse, négative, par la greffière.

    Durant quatre mois, Pierre Falcone va répondre avec suffisance aux questions du tribunal. Car il se sait protégé par son immunité diplomatique et par les autorités françaises, soucieuses de bichonner Dos Santos et son pétrole. Chaque jour, la tension est plus palpable.

    Le 11 février 2009, dans un réquisitoire exemplaire, le vice-procureur Romain Victor décrit « l'ambiance de plomb » et « les menaces à peine voilées » qui ont émaillé le procès. Courageux et pas bégueule, le jeune parquetier évoque le « laisser-faire » de l'Etat français qui a cherché à protéger « ses intérêts économiques et stratégiques ».

    Quant à la démarche d'Hervé Morin, en juillet, elle est « extraordinaire » brocarde le magistrat, car c'est tout de même « une lettre d'une autorité ministérielle adressée à un prévenu de trafic d'armes ! »

    La sanction de ce francparler est immédiate. En réintégrant son estrade après le déjeuner, le procureur est blême. « Il avait l'air vraiment secoué », témoigne un avocat présent ce jour-là. Il explique, gêné, que le journaliste de l'Agence France-Presse, qui a publié une dépêche à la mi-journée, a « un peu déformé » ses propos. Sur leurs carnets, les avocats sont pourtant quarante à avoir pris les mêmes notes !

    Entre-temps, Romain Victor a surtout été convoqué par Jean- Claude Marin. Les remarques acides du jeune procureur n'ont pas plu à l'Elysée, qui l'a fait savoir au parquet. Mais qu'importe le prix à payer, Romain Victor a fait passer son message.

    Falcone condamné à six ans de prison, c'est Hiroshima à Paris

    Le 27 octobre 2009, le tribunal parvient à s'affranchir des pressions et condamne Pierre Falcone à six ans de prison ferme, avec incarcération immédiate. C'est Hiroshima à Paris. Sonné, les yeux clos, le businessman se mord les doigts d'avoir écouté ses avocats. Alors qu'il était en Chine, où il réside désormais, ses conseils, rassurés par Claude Guéant et un professeur de droit, lui avaient assuré qu'il ne risquait rien. Le marchand d'armes quitte pourtant le Palais de justice entre trois gendarmes.

    Six mille cinq cents kilomètres plus au sud, le président Dos Santos est fou furieux qu'on ait pu jeter en prison le héros qui a sauvé Luanda. L'Elysée est en panique. La filière Guéant reprend du service. Auprès du secrétaire général, un apporteur d'affaires, Alexandre Djouhri, relaie les exigences angolaises. Patrick Ouart affirme depuis bien longtemps qu'on ne peut plus rien faire pour sauver le soldat Falcone.

    « Selon lui, toute tentative d'intervention de l'exécutif sur le tribunal ajouterait la “défaite au déshonneur”. »

     

    D'après les informations de L'Express, Djouhri, excédé par cette trop grande prudence, aurait menacé Patrick Ouart en des termes peu équivoques et Nicolas Sarkozy aurait été contraint de lui-même calmer le jeu.

    Claude Guéant a les mains libres. Fissa, il décroche son téléphone et appelle son ami Laurent Le Mesle, le procureur général de Paris, pour lui demander de soutenir la demande de remise en liberté déposée par Falcone. L'avocat général présent à l'audience se démène pour défendre l'homme d'affaires et réclamer sa libération. Mais le président de la cour, Christian Pers, reste sourd à ses appels. Dans un arrêt soigné, il explique primo que l'immunité conférée à Pierre Falcone par l'Angola ne tient pas la route, secundo que, une fois en liberté, le loustic a toutes les chances de prendre la fuite avant son procès en appel.

    Comme pour se faire pardonner, l'Etat français annonce le même jour au Franco-Angolais qu'en raison d'une « erreur de service », il va réduire de 140 millions à 15 millions d'euros le redressement fiscal imposé à sa société ayant mené les ventes d'armes.

    Plus de nouveaux contrats avec l'Angola : « Il y a encore une bouderie »

    Le prévenu se pourvoit en cassation. Rebelote. Cette fois, Claude Guéant contacte Jean-Louis Nadal, le procureur général près la Cour de cassation. Mais, une fois encore, les manœuvres secrètes du secrétaire général de l'Elysée avortent : Falcone devra rester à Fleury-Mérogis jusqu'à son procès en appel, prévu début 2011.

    En toute logique, c'est Christian Pers qui doit présider cette audience à haut risque. Pourtant, à la Toussaint 2010, le magistrat, qui a déjà commencé à travailler le dossier, apprend qu'il est nommé à la Cour de cassation. Surprenant. Aurait-on cherché un juge plus compréhensif ? En tout cas, Alain Guillou, qui a été nouvellement désigné, est présumé être un magistrat à l'échine plus flexible.

    Quelle que soit l'issue du procès en appel, les relations franco-angolaises gardent les séquelles de cette affaire. « Il est sûr qu'il y a encore une bouderie », analyse le spécialiste de l'Afrique, Antoine Glaser.

    D'ailleurs, le président de l'Angola, un parfait francophone, l'a manifesté en boycottant le sommet France-Afrique du 31 mai 2010. C'est un second couteau a qui fait le déplacement à Nice.

    Quant aux entreprises françaises, elles doivent prendre leur mal en patience. Car, si l'Angola exécute les engagements en cours, les nouveaux contrats ne viennent pas.

    lien voir sur:  http://www.rue89.com/



    des nouvelles : la relaxe pour Pierre Falcone...bien sûr!!!
    EXtraits relatant sa carrière maffieuse sous couverture des politiques français, voici un bref aperçu des manchettes de quelques journaux nationaux:

     Pierre Falcone

    Avril 2011 : Libéré le 29 avril 2011 à 18h30 
    Octobre 2009 : Prison ferme dans l'Angolagate 
    Mai 2009 : Appel, prison ferme (théorique) pour Pierre Falcone et Pierre Pasqua 
    Décembre 2007 : Sofremi. Prison ferme pour Pierre Falcone et Pierre Pasqua. Pour le préfet Jean-Charles Marchiani : relaxe
    Octobre 2007 : Le Président Sarkozy rencontre le Président de l'Angola à l'ONU : La justice française lève deux mandats d'arrêt internationaux contre Pierre Falcone, ambassadeur de l'Angola à l'Unesco 
    Juin 2005 : Un banquier en examen 
    Août 2004 : Procès en diffamation 
    Juillet 2004 : La France négotie. Un marchand d'armes bien protégé 
    Mai 2004 : Falcone se moque 
    Le rapport des experts 
    Novembre 2003 : Immunité parlementaire pour Jean-Charles Marchiani 
    Septembre 2003 : Immunité pour Pierre Falcone 
    Janvier 2003 : Témoignage accablant 
    Octobre 2002 : Falcone et Gaydamak...... intermédiaires planétaires 
    25 octobre 2002 : Pierre Falcone en liberté 
    15 octobre 2002 : Pierre Falcone retourne en prison

    Août 2002 : Le rapport secret met en cause Charles Pasqua

    31 mai 2002 : Les hôtesses travaillaient pour Falcone 
    24 mai 2002 : Pierre Falcone inculpé en Suisse

    13 avril 2002 : Hubert Védrine et Jacques Attali 
    1er avril 2002 : Le trafic d'armes vers l'Angola s'est poursuivi jusqu'à l'été 2000 
    Le Parisien, 28 février 2002 
    La Nouvelle République, 22 février 2002 
    Le Monde, 10/11 février 2002 
    Le Monde, 15 janvier 2002 
    Le Figaro, 09 janvier 2001 
    Libération, 20/21 janvier 2001 
    Le Parisien, 12 juillet 2001 
    L'Express, 18 octobre 2001 
    Le Parisien, 07 novembre 2001 
    Le Parisien, 30 novembre 2001 
    Le Monde, 01 décembre 2001 
    Le Monde 04 décembre 2001

    Libération, 23/24 décembre 2000, p. 4
    De mère colombienne, de père napolitain, Pierre Falcone, âgé de 46 ans, passe pour être, sur la scène angolaise, beaucoup plus qu'un marchand d'armes qui aurait mis à profit la guerre opposant le régime d'Eduardo Dos Santos à son opposant Jonas Savimbi, le leader de l'Unita.

    On lui prête une implantation dans les exploitations de diamants, dans l'hôtellerie. Bref, dans les milieux diplomatiques, il passe pour avoir investi une part de l'économie angolaise. Vrai, faux? Le dirigeant de Brenco international, actuellement incarcéré à la prison de la Santé, a surtout mis en place une petite PME de vente d'armes aux ramifications internationales difficiles à cerner.

    Brenco Trading Limited à l'île de Man, Brenco Investment à Montréal, Brenco Limited à Londres, Brenco Coren SA à Bogota. Il a aussi des filiales en Argentine, en Birmanie. Cette liste parle un peu d'elle-même. Falcone n'hésite pas à braver les embargos. Ainsi en Birmanie, il va vendre 24 hélicoptères polonais à travers la Setraco, en 1992. Grâce à l'introduction des hommes de Pasqua, il parvient à devenir l'un des agents de la Sofremi, l'office de ventes d'armes du ministère de l'Intérieur, en 1989. Yan Guez, un collaborateur de l'ancien ministre de l'Intérieur, le fait venir. Falcone va se faire représentant de commerce officiel.

    En Colombie, en Guinée, à Madagascar, en Russie, au Kazakhstan, il conduit des délégations d'industriels. Et bien sûr en Angola. Son plus gros marché - 500 millions de dollars d'armement - est conclu avec le régime du président Dos Santos. Bien que le ministère de l'Intérieur français soit derrière le deal, il s'agit d'armes provenant de l'ex-URSS.
    C'est que Falcone s'est associé à l'homme d'affaires russe Arcadi Gaydamak. Les deux hommes seront payés en pétrole, à travers des sociétés de trading. L'ennui c'est que le paiement sera découvert par le fisc en 1996, sur un compte de la banque Paribas. Une société slovaque, Zts-Ozos, a vendu les armes. Falcone et son associé russe Arcadi Gaydamak ont la procuration. Le fisc savait depuis 1993 que Falcone travaillait avec la Sofremi. Les juges vont découvrir que le contrat angolais fait partie d'un plan plus vaste de coopération couvert par le ministère de l'Intérieur et le préfet Jean-Charles Marchiani. Ils trouvent toutes les coordonnées de l'ancien député du Var, aujourd'hui parlementaire européen, dans les archives de Brenco.

    Ils soupçonnent des dons au RPF de Pasqua. Mais n'en ont pas la preuve. Falcone quitte l'orbite de la Sofremi en 1998, après avoir tenté une nouvelle vente à l'Angola, finalement refusée par la Commission interministérielle pour l'étude de l'exportation des matériels de guerre. Un contrat de 225 millions de francs portant sur des radars et des caméras thermiques. L'Angola reste un no man's land diplomatique pour les marchands d'armes. Et Falcone est devenu trop sulfureux.

    09 janvier 2001.

    "Falcone a arrosé tout le monde pendant des années".
    C'est la terrible accusation formulée par le PDG de la Sofremi à l'égard de l'homme d'affaires Pierre Falcone, mouillé dans l'affaire du trafic d'armes en Angola.
    Philippe MATHON, Le Figaro, mardi 09 janvier.

    Pierre Falcone, mis en examen et écroué depuis le 1er décembre dans une affaire de ventes d'armes vers l'Angola, "a arrosé tout le monde pendant des années", affirme le PDG de la Sofremi, Henri Hurand, dans un entretien au Figaro.

    "J'ai la conviction que Pierre Falcone a arrosé tout le monde pendant des années", affirme M. Hurand, nommé à la tête de la Sofremi (Société française d'exportation du ministère de l'Intérieur) en octobre 1997, et qui doit être prochainement entendu comme témoin dans le cadre de cette affaire dans laquelle Jean-Christophe Mitterrand est incarcéré à la prison de la Santé. Voilà des termes peu courants de la bouche d'un homme de ce rang. Des propos qui ne sont pas sans rappeler Alfred Sirven, l'homme-clé de l'affaire Elf actuellement en fuite, qui se plaisait à dire que tout le monde "lui mangeait dans la main".

    "Rémunérations exorbitantes"
    "La règle générale était que sur chaque marché intervenait un intermédiaire particulier. Or, à partir de 1992, Pierre Falcone est l'unique interlocuteur de la Sofremi. C'est totalement anormal. Il obtient des rémunérations exorbitantes sur chaque opération", explique M. Hurand. "La Sofremi a donné beaucoup d'argent à Falcone pour rien", ajoute-t-il, estimant que ce dernier "a utilisé la Sofremi comme paravent pour ses activités personnelles".

    Dirigeant de fait de la société de ventes d'armes Brenco International, Pierre Falcone est considéré par l'accusation comme le personnage central de ce dossier instruit par les juges d'instruction Philippe Courroye et Isabelle Prévost-Desprez. Les locaux de la Sofremi ont été perquisitionnés il y a une semaine par le juge Courroye. Une perquisition a également eu lieu mardi dans les locaux parisiens de la société de Brenco, à la demande des juges d'instruction Philippe Courroye et Isabelle Prévost-Desprez.

    Pasqua et Joxe dans le collimateur
    Pasqua, une nouvelle fois cité dans l'affaire Falcone -
    Interrogé sur la connaissance que pouvait avoir le ministère de l'Intérieur, -dont dépend la Sofremi -, de ces agissements, M. Hurand rappelle que Falcone a travaillé sous quatre ministres de l'Intérieur successifs mais que "la période la plus significative est celle de Charles Pasqua". "Tout le monde sait que celui-ci a toujours suivi de près ce genre de marchés internationaux et que c'est lui qui a nommé le tandem Dubois-Poussier à la tête de l'entreprise", ajoute-t-il, notant "au passage, que Poussier (ancien directeur général de la Sofremi écroué depuis le 14 décembre dans ce dossier, NDLR) a des origines corses".

    "On peut distinguer trois catégories de ministres de l'Intérieur. Ceux qui ont entretenu des liens étroits avec la Sofremi: c'est le cas de Pasqua mais également du créateur de l'entreprise, Pierre Joxe. Ceux qui ne s'en sont pas réellement préoccupés, tels Philippe Marchand et Paul Quilès, et ceux qui s'en sont méfiés. C'est le cas de Jean-Louis Debré".

    M. Hurand explique en outre qu'il a fait réaliser, à son arrivée à la tête de l'entreprise, "un audit par un cabinet indépendant" à la suite duquel il a engagé "une véritable mission d'assainissement". Ce document, "depuis la semaine dernière entre les mains du juge Courroye", "montre que le train de vie de la société était considérable", explique-t-il, soulignant qu'il "ignorait tout, jusqu'à ces dernières semaines" du marché des ventes d'armes à l'Angola. Les juges d'instruction enquêtent sur des armes vendues en 1993-94, pour un montant global de plus de 500 millions de dollars, au régime angolais du président José Eduardo Dos Santos et aux importantes commissions qui auraient été versées en marge de ces contrats.

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    Libération, 20/21 janvier 2001, Affaire Falcone: le Cameroun fait fi des salades françaises. Yaoundé s'étonne de la curiosité des juges français.
    Par CHRISTOPHE AYAD.

    Les Camerounais n'ont aucune envie d'être impliqués dans le scandale français des ventes d'armes, instruit par les juges Philippe Courroye et Isabelle Prevost-Desprez. Les révélations du Monde sur des ventes d'armes de Brenco, société de Pierre Falcone, au Cameroun et l'intérêt des magistrats français ont provoqué l'incompréhension des autorités locales. Interrogé sur ce sujet par Libération, le ministre de la Défense, Ahmadou Ali, s'est d'abord dit «étonné». «A l'époque des faits cités, en 1994, j'étais secrétaire d'Etat à la Défense. Je n'ai jamais rencontré M. Falcone.»

    Le responsable gouvernemental a fait rechercher dans les archives de son ministère les correspondances entre la société de Pierre Falcone et le ministère de la Défense. Ses services ont retrouvé trois commandes passées par le ministère de la Défense à ZTS-Osos en 1994. Le premier, en date du 16 mars 1994, porte sur 1598300 dollars, le deuxième, du 28 mars, pour un montant de 263000 dollars et le troisième, du 31 mars, est de 747500 dollars. «Soit un total de 2,6 millions de dollars d'armes légères défensives, et non pas 72 millions», précise-t-on côté camerounais. «La somme a été payée à ZTS-Osos, société d'Etat tchèque, expliquent les officiels camerounais. Nous n'avons rien versé à M. Falcone: s'il a reçu un pourboire des Tchèques, ce n'est pas notre problème.»

    Propositions.
    Le ministère de la Défense camerounais a aussi retrouvé une correspondance entre Falcone et Edouard Akame Mfoumou, ministre de la Défense à l'époque: Falcone y propose divers armements. Mais les Camerounais s'emmêlent dans les dates. Ces documents seraient datés de 1996. Un fax du 29 février, à en-tête de Brenco France, annonce que Pierre Falcone prépare de la documentation.

    Hélicoptères.
    Dans un autre fax de trois pages, daté du 1er mars, Pierre Falcone s'excuse de son «retard». Il dit avoir contacté des fabricants «dans les trois jours suivant [son] retour. S'ensuit une liste de matériels militaires, dont certains de "production tchécoslovaque"». Deux solutions «de lanceurs de roquettes sont proposées: le POM35 ou POM70, plus recommandable, et le POM14, transportable par hélicoptère». Justement, des hélicoptères MI17, de fabrication russe, sont bien proposés à la vente à 2,9 millions de dollars pièce. Le fax précise que le MI17 est «l'équivalent du Superpuma français, qui coûte 13 à 14 millions de dollars». Ce fax est accompagné d'une abondante documentation décrivant les armements. Un dernier courrier, du 12 mars 1996, propose une courte liste complémentaire de matériel.

    Apparemment, ces contacts ont été concluants: le Cameroun aurait commandé, «en urgence» et par trois lettres datées de mars 1996, des lance-roquettes (vingt FPG9 et cent RPG7), pour un montant total de 3 millions de dollars.

    Mais Ahmadou Ali s'étonne des chiffres cités dans la presse française: «Les armes, ça pèse lourd. Pour 72 millions de dollars, 30 tonnes ce n'est rien. A ce prix-là, ça doit être une bombe atomique! ironise-t-il. Si le Cameroun avait acheté des armes pour ce montant, ça fait longtemps que nous aurions chassé les Nigérians de Bakassi.»

    «Petites choses».
    Edouard Akame Mfoumou, son prédécesseur, a un peu plus de mémoire. «Bien entendu, j'ai rencontré M. Falcone en 1994. Il m'a été recommandé par mon patron (le président camerounais Paul Biya, ndlr). Il est venu à Yaoundé avec son avion personnel. Il nous a présenté une liste de tous les matériels qu'il était capable de livrer, cela faisait effectivement un montant total de 72 millions de dollars. Et dans cette liste, nous avons choisi des petites choses pour un montant total de 2,5 millions de dollars.» Il se souvient encore du système de paiement: «Pierre Falcone nous a indiqué le nom d'une société tchèque, ZTS-Osos, pour le paiement. C'est à elle que nous avons réglé la somme.» Mais leur souci n'est pas dans les dates ou le montant des versements. «Le Cameroun est un Etat souverain qui a le droit d'acheter des armes pour se défendre, insiste Ahmadou Ali. Si c'est un règlement de comptes franco-français, nous ne voulons pas y être mêlés.».

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    Un haut magistrat mis en examen

    CE QU'IL EST CONVENU d'appeler l'« Angolagate » vient de s'enrichir d'un nouvel épisode puisqu'il concerne un haut magistrat. Georges Fenech, substitut au parquet général de Lyon, a été mis en examen mardi soir par la juge d'instruction Isabelle Prévost-Desprez, pour « recel d'abus de biens sociaux » et placé sous contrôle judiciaire. Il n'a désormais plus le droit d'entrer en contact avec l'un des protagonistes de cette gigantesque affaire de vente d'armes illicite vers l'Angola, en l'occurrence Arcadi Gaydamac, l'homme d'affaires d'origine russe associé de Pierre Falcone au sein de la société Brenco, à travers laquelle ont été vendues des armes à l'Angola.
    Georges Fenech avait été convoqué par la brigade financière et placé en garde à vue avant d'être présenté à la magistrate. Celle-ci s'intéresse de près à un virement de 100 000 F (15 245 €) effectué par la société Brenco de Pierre Falcone à l'Association professionnelle des magistrats (APM) présidée à l'époque par Georges Fenech. Les traces de ce don figuraient sur une disquette saisie chez l'assistante de Pierre Falcone. Interrogé sur ce mécénat, qui consistait, pour Pierre Falcone, à souscrire 25 abonnements de deux ans à la revue de l'APM, Georges Fenech a estimé que le patron de Brenco avait agi de façon désintéressée. La magistrate n'a pas été convaincue, d'autant qu'elle a appris que Falcone et Fenech sont entrés en contact via le général Claude Mouton, qui fut, de 1993 à 2000, vice-président de la Compagnie des signaux. Cette entreprise de matériel électronique de défense a, elle aussi, commercé avec l'Angola. Coïncidence peut-être, le général Mouton est devenu l'an dernier directeur général de Brenco, et il est lui aussi mis en examen pour recel d'abus de biens sociaux dans cette affaire.

    « J'ignorais que Brenco vendait des armes »
    Par ailleurs, les enquêteurs ont relevé qu'une plainte de l'organisme de lutte antiblanchiment Tracfin sur les flux financiers de Brenco avait été classée sans suite par le parquet de Paris, en janvier 1997. Or le magistrat qui a pris cette décision est un ancien membre de l'APM, parti quelque temps plus tard pantoufler à la Compagnie des signaux. La justice se demande si les 100 000 F versés à Brenco ne constitueraient pas un renvoi d'ascenseur après la mansuétude de certains magistrats. « J'ignorais que Brenco vendait des armes. Pour moi, cette société faisait de la vente de produits alimentaires. Je ne peux pas être responsable des problèmes judiciaires de M. Falcone. Le système judiciaire est devenu fou car les juges font des constructions intellectuelles et ne s'attachent pas aux faits. On en arrive à ces dérives car les magistrats n'ont aucune responsabilité et n'ont pas à rendre compte des dégâts qu'ils peuvent causer », s'indignait hier soir Georges Fenech, estimant qu'il s'agit aussi d'une « grave atteinte à la liberté syndicale car plus aucune société ne fera désormais de dons à une association ». Son avocat, Lev Forster, a prévu de saisir la chambre de l'instruction pour faire annuler cette mise en examen qui ne « repose sur aucun indice ».

    Mais une autre affaire risque de resurgir. Pourquoi Georges Fenech, lorsqu'il était le patron de l'APM, est-il allé au Gabon en décembre 1998 surveiller les élections du président Bongo en compagnie de magistrats recrutés dans son syndicat et d'un avocat qui assure aujourd'hui la défense de l'un des principaux protagonistes impliqué dans le trafic d'armes vers l'Angola ? Cette proximité très particulière intéresse aussi les enquêteurs, qui veulent décortiquer son réseau de relations qui croise tous les personnages mis en cause dans le dossier. « Je suis effectivement l'ami d'avocats mais pas pour autant de leurs clients », réplique le magistrat qui voit dans cette nouvelle morale dictée par les juges « la fin » de toute relation sociale.
    Alain Frédéric et Jean-Marc Ducos

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    Pierre Falcone trahi par son disque dur *

    Les éléments trouvés sur l'ordinateur de l'homme d'affaires incarcéré éclairent d'un jour nouveau l' «Angolagate»

    Un petit miracle informatique va sans doute donner un second souffle à l'instruction du juge Courroye sur le trafic d'armes en Angola: après des mois de travail, l'expert Serge Migayron est parvenu à «faire parler» le disque dur d'un ordinateur saisi avenue Kléber, dans les locaux de l'homme d'affaires Pierre Falcone, incarcéré depuis décembre 2000. L'expert a notamment exhumé le compte rendu d'activités complet des années 1999-2000. Cette liste de «mémos» - authentifiée, le 1er octobre, devant le juge par l'assistante de Falcone, Isabelle Delubac - témoigne de l'extrême «générosité» de l'homme d'affaires avec ses célèbres amis.

    En face de son nom de code, un autre mémo indique: «500 000 FR»
    On y apprend ainsi qu'une société de pêche mauritanienne de Jean-Christophe Mitterrand, Iwik, a bénéficié d'un virement de 300 000 dollars (2 millions de francs) en 1999. Interrogé fin août par le juge Courroye, le fils de l'ancien président de la République avait pourtant nié que ce virement provenait de Pierre Falcone... Un autre ami de ce dernier apparaît lui aussi très régulièrement dans ces nouveaux mémos, sous le pseudonyme «Robert»: il s'agit du député européen Jean-Charles Marchiani, mis en examen dans le dossier. Selon ces documents inédits, Falcone a mis à la disposition de ce proche de Charles Pasqua une voiture avec chauffeur à partir de 1999. Mais Marchiani ne s'est apparemment pas contenté de cette généreuse aide en nature. En face de son nom de code, un autre mémo indique: «500 000 FR». Selon Isabelle Delubac, qui a tapé ce document à l'époque, cela signifie que le député européen devait percevoir cette somme.

    Au milieu de ces centaines de comptes rendus et de messages téléphoniques, au détour desquels apparaît également Jacques Attali (sous le pseudonyme de «Lunettes»), on trouve encore trace de deux virements en faveur du général Mouton, un ancien haut gradé du Secrétariat général de la défense nationale, recruté par Pierre Falcone. Au total, 500 000 francs ont atterri sur un compte bancaire subtilement baptisé «Panurge»... Fort de ces nouveaux éléments, le juge Courroye a entendu, ces derniers jours, les principaux acteurs de ce dossier à tiroirs. Dans le même temps, plusieurs avocats de personnes mises en examen, comme Jean-Christophe Mitterrand ou Charles Pasqua, multipliaient les recours contre l'instruction du magistrat.
    L'Express du 18/10/2001, p. 32, par Jérôme Dupuis et Gilles Gaetner

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    Les nouvelles accusations de la secrétaire de Falcone

    LE BRAS DE FER se durcit entre le juge Courroye et le camp Pasqua. Alors qu'une première plainte a été déposée par l'ancien ministre de l'Intérieur pour faux en écriture publique visant le magistrat, une « seconde est en préparation », menace Jean-Charles Marchiani, l'ancien préfet du Var, mis en examen dans le dossier de trafic d'armes avec l'Angola. A deux reprises, les 18 et 25 octobre, l'ancien préfet ne s'est d'ailleurs pas rendu aux convocations du juge. Protégé par son immunité de député européen, rien ne peut le contraindre à se présenter. « La première convocation était faite de manière illégale, la seconde tombait le jour et l'heure où le Parlement européen devait justement me faire part de sa demande de levée d'immunité », peste Jean-Charles Marchiani. Le juge Courroye, de son côté, est également en proie à une certaine irritation. Dans un courrier rageur adressé au parquet, le magistrat s'étonne des lenteurs... du ministère de la Justice. A l'origine de cette grogne, justement, les demandes de levée d'immunité de parlementaire européen de Charles Pasqua et de Jean-Charles Marchiani. Selon le juge, alors que les deux demandes ont été adressées fin juillet place Vendôme, via le parquet de Paris puis le parquet général, les services de Marylise Lebranchu ont ensuite mis près de « quatre mois » avant de transmettre les deux dossiers à Strasbourg. Quatre mois perdus pour l'enquête, estime le juge Courroye. En marge de ce bras de fer, le dossier angolais progresse. Le magistrat a ainsi entendu longuement la secrétaire de Pierre Falcone. Isabelle Delubac a été interrogée sur « Robert », un mystérieux pseudonyme cité très souvent dans les mémos secrets de Pierre Falcone. « A ma connaissance Robert était M. Marchiani », a indiqué la secrétaire. Celle-ci a reconnu aussi qu'une Safrane avec chauffeur a été mise à la disposition du député européen et qu'un retrait en espèces de 500 000 F pourrait correspondre à « un déplacement de M. Marchiani en Angola ». « Tout le monde sait en Afrique que Robert est un terme générique désignant les services secrets français, comme on dirait Popov pour les Russes », nous explique pour sa part l'ancien préfet du Var, se défendant de tout soupçon. Le terme « Robert » viendrait, selon lui, du nom du colonel Robert, un ancien patron des services secrets français en Afrique. Pourtant, dans un des mémos de Falcone, Robert était accolé au propre téléphone portable de l'ancien préfet... « C'était un bon client »
    Quoi qu'il en soit, en attendant de pouvoir entendre le député européen sur ce point, le juge Courroye a mis en examen pour recel d'abus de biens sociaux René Micaud, le PDG d'Air Entreprise, le « numéro un de l'aviation d'affaires ». Au cours d'une perquisition dans une banque luxembourgeoise, les enquêteurs sont en effet tombés sur un virement de plusieurs millions de dollars, correspondant à l'achat d'un jet de type Challenger. Pierre Falcone aurait revendu ce bimoteur au bout d'un an en 1998, avec l'aide d'Air Entreprise. « Pierre Falcone était un bon client, nous indique René Micaud, et je ne vois pas de quel droit je devrais enquêter sur l'origine de son argent ! Tous les gens cités dans ce dossier, comme dans tous les dossiers judiciaires depuis dix ans, nous les avons transportés à un moment ou à un autre », reconnaît René Micaud.
    Laurent Valdiguié avec Alain Frédéric, Le Parisien, 7 novembre 2001, p. 14

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    Pierre Falcone sortira de prison demain (1er décembre 2001)

    L'HOMME D'AFFAIRES soupçonné d'avoir orchestré un trafic d'armes en direction de l'Angola est détenu depuis un an dans le cadre de l'information judiciaire instruite par les juges Philippe Courroye et Isabelle Prévost-Desprez. Incarcéré dans la nuit du 1 e r au 2 décembre 2000, son mandat de dépôt vient donc à expiration dimanche, mais ni les juges ni le parquet n'ont jugé utile de prolonger la détention.

    « L'enquête se poursuit sereinement »
    Pierre Falcone doit donc quitter Fleury-Mérogis samedi et devrait être placé sous contrôle judiciaire. « Mon client a fait preuve en prison d'un courage et d'une fermeté remarquables, il va continuer à se battre pour proclamer son innocence », plaide son avocat, M e Christian Charrière-Bournazel. Pierre Falcone libre, le bras de fer continue entre le juge Courroye et les mis en examen du dossier, au rang desquels, Charles Pasqua, Jean-Charles Marchiani, Jean-Christophe Mitterrand, Paul-Loup Sulitzer, Allain Guilloux et Jacques Attali. Plusieurs avocats, très remontés contre l'instruction, soulèvent d'ailleurs ce matin devant la cour d'appel de Paris une série de vices de procédure. « L'enquête se poursuit sereinement », assure-t-on en écho au palais de Justice. Douze mois de détention préventive n'ont en rien entamé la détermination de Pierre Falcone. Le juge dispose de deux éléments à charge : les « mémos » informatiques déchiffrés par les experts et les aveux de son ancienne secrétaire. Celle-ci a accepté de décoder les mémos aux enquêteurs, et a révélé certaines abréviations utilisées dans cette comptabilité occulte de la société Brenco. Ainsi, selon elle, les expressions comme « Galilée » ou « docs » signifient des sorties en espèces. « Docs 500 » voudrait dire « sortie de 500 000 F » en cash. La secrétaire a également affirmé que des correspondants de Pierre Falcone sont dissimulés derrière des pseudos : « Robert » désignerait ainsi Jean-Charles Marchiani et « Panurge » l'ancien général Claude Mouton, également mis en examen dans ce dossier. « Lunettes » désignerait enfin Jacques Attali, l'ancien conseiller de François Mitterrand. Face à ces accusations Pierre Falcone est resté de marbre.

    « J'ai conscience d'avoir rendu service à mon pays »
    Lors de sa dernière audition devant le juge Courroye, le 10 octobre (2001), l'homme d'affaires a nié. « Robert » ? « Je qualifiais de Robert tous les gens travaillant avec ou pour les services secrets étrangers ou français », explique-t-il, assurant n'avoir jamais remis d'espèces à Jean-Charles Marchiani. Il a néanmoins reconnu lui « avoir mis une voiture à disposition quand il était à Paris, de mi-1999 à 2000 inclus ». « C'est moi qui lui ai rendu ce service et j'ai conscience d'avoir rendu service à mon pays en le faisant », explique Falcone. Qui est donc le Robert des mémos qui perçoit des espèces ? « C'est un Robert angolais dont je ne peux dire plus, et qui est souvent passé en Europe », raconte l'homme d'affaires. Difficile à vérifier pour les enquêteurs. Seule concession, Pierre Falcone a reconnu que des fonds en liquide parvenaient bien à ses locaux, via un certain Sam Mandelsaft. « Cet argent lui était remis par des officiels angolais et il l'apportait au bureau. Il récupérait ce cash avenue Foch près de l'ambassade d'Angola », a dit Falcone au juge. Difficile, pour le magistrat, de savoir qui touchait ensuite les fonds.
    Laurent Valdiguié, Le Parisien, 30 novembre 2001, p. 17

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    Pierre Falcone est remis en liberté

    L'homme d'affaires français Pierre Falcone, considéré comme le personnage central dans une affaire de trafic d'armes vers l'Angola, a quitté samedi (1er décembre 2001) la prison de Fleury-Mérogis, près de Paris, un an après son incarcération

    L'homme d'affaires français Pierre Falcone, considéré comme le personnage central dans une affaire de trafic d'armes vers l'Angola, a quitté samedi la prison de Fleury-Mérogis, près de Paris, un an après son incarcération, a indiqué son avocat. Il est sorti discrètement, a indiqué Me Christian Charrière-Bournazel, expliquant que son client "n'était pas en état, après un an de détention douloureuse, de s'exprimer publiquement".

    "Le juge d'instruction nous a informés que M. Falcone serait libéré samedi matin", avait déclaré jeudi soir à l'AFP Me Christian Charrière-Bournazel. "Nous ne connaissons pas les modalités du contrôle judiciaire dont cette liberté sera assortie", avait-t-il ajouté. Mis en examen pour "trafic d'influence, commerce illicite d'armes sans autorisation, abus de biens sociaux et abus de confiance", M. Falcone, 47 ans, avait vu ses nombreuses demandes de remises en liberté régulièrement rejetées. Il était la dernière personne encore en détention provisoire dans cette affaire dans laquelle sont poursuivies plusieurs personnalités de droite comme de gauche, dont Jean-Christophe Mitterrand, fils de l'ancien président socialiste de la République, et l'ancien ministre conservateur de l'Intérieur Charles Pasqua.

    De nationalité française, M. Falcone, dirigeant de la société de vente d'armes Brenco, est soupçonné d'avoir vendu en 1993 et 1994, sans avoir reçu d'autorisation officielle des autorités françaises, pour plus de 500 millions de dollars d'armes, venant d'Europe de l'Est, au régime angolais. D'importantes commissions ont été versées en marge de ces ventes.

    Le 19 octobre dernier, lors d'une audience publique devant la chambre de l'instruction de la Cour d'appel de Paris qui examinait une demande de remise en liberté, Pierre Falcone avait affirmé qu'il était "innocent de tout ce dont on (l)'accuse". Interrogé sur les soupçons de trafic d'influence pesant contre lui, il avait répondu : "J'ai passé ma vie à rendre des services. Je n'ai jamais demandé et a fortiori monnayé quoi que ce soit comme faveur".

    Pierre Falcone est né le 19 mars 1954 à Alger, où son père et ses oncles paternels, originaires de la région de Naples, géraient une société de pêche et conserveries de sardines Papa Falcone. Sa soeur Josée-Line et son chauffeur sont également poursuivis dans l'affaire du trafic d'armes, pour "recel d'abus de biens sociaux", ayant perçu de l'argent venant de la société de ventes d'armes Brenco, qui était dirigée par M. Falcone. L'autre personnage central de l'affaire, Arcadi Gaydamak, fait l'objet d'un mandat d'arrêt international depuis le 6 décembre 2000. Réfugié en Israël, ce riche homme d'affaires né en Russie, disposant de quatre nationalités (angolaise, canadienne, israélienne et française), a toujours refusé de s'expliquer devant les juges d'instruction parisiens en charge de ce dossier et a toujours affirmé son innocence.
    Avec AFP, lemonde.fr, | 01.12.01 | 12h10

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    Pierre-Joseph Falcone a été remis en liberté après un an de détention

    L'homme d'affaires Pierre Joseph Falcone, au cœur de l'enquête sur les ventes d'armes vers l'Angola, a été remis en liberté samedi 1er décembre. M. Falcone, qui était incarcéré depuis le 1er décembre 2000, ne pouvait être maintenu plus d'un an en détention provisoire en vertu de la loi sur la présomption d'innocence. Devant la prison de Fleury-Mérogis (Essonne), son avocat, Me Christian Charrière-Bournazel, a indiqué que son client avait "été victime d'une machination, un terrorisme judiciaire".

    Pierre-Joseph Falcone a été astreint à une caution record de 16 millions d'euros (environ 105 millions de francs) et à un contrôle judiciaire strict qui lui interdit notamment de quitter Paris - il devra pointer trois fois par semaine au palais de justice -, de gérer une société, d'entrer en contact avec les autres mis en examen ainsi qu'avec une quarantaine de témoins.

    Mis en examen pour "trafic d'influence, commerce illicite d'armes, fraude fiscale, abus de biens sociaux et abus de confiance", Pierre-Joseph Falcone, 47 ans, était la dernière personne en détention provisoire dans cette affaire dans laquelle sont poursuivies plusieurs personnalités comme Jean-Christophe Mitterrand, Charles Pasqua ou Paul-Loup Sulitzer. A titres divers, elles auraient bénéficié de la prodigalité intéressée de M. Falcone. Dirigeant de la société Brenco, il est soupçonné d'avoir vendu en 1993 et 1994, sans autorisation, pour 633 millions de dollars d'armes au gouvernement angolais.

    Lors de son dernier interrogatoire par le juge Philippe Courroye, le 10 octobre, M. Falcone a été interrogé sur un " mémo" de juin 1999, découvert récemment chez sa secrétaire, Isabelle Delubac, indiquant que Philippe Douste-Blazy, actuel président du groupe UDF à l'Assemblée nationale et maire de Toulouse, avait souhaité le convier à dîner, en compagnie d'un couple d'amis communs, les Pascal. "Il se peut qu'il m'ait appelé pour m'inviter à dîner", a déclaré M. Falcone. "A quel titre ?", lui ont demandé les magistrats. "Je ne sais pas. Peut-être a-t-il voulu me connaître", a répondu l'homme d'affaires, qui a assuré que "cette rencontre n'(avait) pas eu lieu". Questionné sur un autre " mémo", de juin 1998, indiquant : "M. Pascal : M. Douste-Blazy a été élu à l'Assemblée nationale groupe alliance UDF", M. Falcone a déclaré : "je pense que M. Douste-Blazy doit être un ami de Pascal et que celui-ci a voulu me téléphoner pour me dire que son ami avait été élu". Interrogée le 1er octobre, Mme Delubac avait affirmé : "C'est un message qui a dû être adressé à M. Falcone lorsqu'il était à l'étranger. Peut-être pour qu'il félicite Philippe Douste-Blazy de son élection. Je ne sais pas -s'ils- se voyaient." Lundi matin 3 décembre, M. Douste-Blazy a indiqué au Monde n'avoir "rencontré M. Falcone qu'une fois, à la demande du père d'un de -ses- collaborateurs - Camille Pascal - qui était le décorateur d'intérieur de M. Falcone. Cette rencontre n'a eu aucune suite", a-t-il assuré.
    Fabrice Lhomme, Le Monde, 4 décembre 2001, p. 38, LE MONDE | 03.12.01 | 15h29

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    M. Douste-Blazy a été interrogé en qualité de témoin dans l'affaire Falcone

    APRÈS Gérard Depardieu, l'abbé Pierre ou encore Danielle Mitterrand, la galerie des personnalités invitées à témoigner dans l'affaire Falcone s'est enrichie d'une nouvelle figure. Jeudi 3 janvier, c'était au tour de l'actuel président du groupe UDF à l'Assemblée nationale et maire de Toulouse (Haute-Garonne), Philippe Douste-Blazy, d'être interrogé par le juge parisien Philippe Courroye, qui l'avait convoqué en qualité de témoin. M. Douste-Blazy s'est expliqué sur la nature de ses relations avec Pierre-Joseph Falcone, l'homme d'affaires au centre de l'enquête sur les ventes d'armes vers l'Angola, libéré le 1er décembre 2001 à l'issue d'un an de détention provisoire.

    Le nom de M. Douste-Blazy est apparu à l'automne 2001, à la suite d'une perquisition chez la secrétaire de M. Falcone, Isabelle Delubac (Le Monde du 4 décembre 2001). L'examen de disquettes dissimulées à son domicile avait permis aux enquêteurs de trouver trace de nombreux " mémos" sur lesquels figuraient les personnes avec qui M. Falcone était en contact. Plusieurs de ces documents ont mis en lumière l'existence de relations entre l'homme d'affaires et l'ancien ministre de la santé (1993-1995) puis de la culture (1995-1997), qui auraient eu lieu par l'intermédiaire de Jacques Pascal. Décorateur d'intérieur, M. Pascal a effectué des travaux chez M. Falcone. Le fils de Jacques Pascal, Camille Pascal, a été un collaborateur de M. Douste-Blazy.

    découverte de "mémos"
    L'un des " mémos" découverts, daté de juin 1998, indiquait : "M. Pascal : M. Douste-Blazy a été élu à l'Assemblée nationale groupe alliance UDF." "C'est un message qui a dû être adressé à M. Falcone lorsqu'il était à l'étranger", avait déclaré Mme Delubac au juge Courroye, le 1er octobre 2001. "Peut-être pour qu'il félicite M. Douste-Blazy de son élection", avait-elle ajouté. Un autre " mémo", du 12 mai 1999, signalait, en dessous de la mention "bureau Philippe Douste-Blazy" : "Avait convenu lors du dernier RV de vous rappeler." Un troisième, en date du 10 juin 1999, portait l'annotation suivante : "Ph Douste-Blazy. Aimerait vous inviter à un dîner avec les Pascal. Voir votre planning pour disponibilités."

    Interrogé le 10 octobre 2001, M. Falcone avait indiqué, à propos de Jacques Pascal, qu'il avait "fait pas mal de décoration au bureau avenue Kléber et à la maison avenue Montaigne". Questionné sur le " mémo"de juin 1999, il avait affirmé : "Il se peut que [M. Douste-Blazy] m'ait appelé pour m'inviter à dîner." "A quel titre ?", lui avait demandé le juge. "Je ne sais pas. Peut-être a-t-il voulu me connaître ?", avait répondu M. Falcone. "Cette rencontre n'a pas eu lieu. Je ne le connais pas", avait assuré pour conclure l'homme d'affaires.

    Lundi 14 janvier, Philippe Douste-Blazy a déclaré au Mondeavoir expliqué au juge Courroye qu'il avait rencontré M. Falcone "une seule fois, une vingtaine de minutes, courant 1998". "A l'époque, je cherchais des sponsors pour le club de rugby de Lourdes, ville dont j'étais le maire. Mon collaborateur, Camille Pascal, m'avait alors soumis le nom de M. Falcone, qu'il m'avait présenté comme un homme d'affaires en relation avec son père." Selon M. Douste-Blazy, la rencontre avec M. Falcone n'aurait "donné aucun résultat". "Lorsque nous avions discuté et que je lui avais demandé s'il pouvait financer l'équipe, il ne m'avait dit ni oui ni non. Ensuite, j'ai dû essayer de le joindre au téléphone deux fois, mais sans succès." Le maire de Toulouse affirme n'avoir découvert la nature des activités de M. Falcone qu'à la fin de l'année 2000, "lorsque la presse a évoqué ses mises en examen". "On me parle aujourd'hui d'articles de L'Evénement du jeudi datant de 1997 et relatant son éventuelle implication dans un trafic d'armes, mais je n'en avais jamais eu connaissance", conclut M. Douste-Blazy.
    Fabrice Lhomme, LE MONDE | 15.01.02 | 16h03

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    Les juges demandent à entendre Hubert Védrine et Pierre Moscovici dans le cadre de l'affaire Falcone

    LE PARQUET de Paris a transmis au parquet général, vendredi 8 février, la demande formulée la veille par les juges d'instruction parisiens Philippe Courroye et Isabelle Prévost-Desprez, qui souhaitent interroger, en qualité de témoins, le ministre des affaires étrangères, Hubert Védrine, ainsi que le ministre délégué chargé des affaires européennes, Pierre Moscovici, dans l'enquête sur les ventes d'armes vers l'Angola. Le parquet général doit désormais transmettre le dossier à la chancellerie, qui rédigera un rapport à l'intention du conseil des ministres, seul habilité à autoriser l'audition de deux de ses membres.

    Les magistrats semblent faire un lien entre les rémunérations versées par Pierre-Joseph Falcone - l'homme d'affaires au centre de l'enquête judiciaire - à Jacques Attali et les démarches que ce dernier aurait effectuées en faveur de M. Falcone auprès du ministère des affaires étrangères. Ancien conseiller de François Mitterrand à l'Elysée, M. Attali est poursuivi depuis le 8 mars 2001 pour "recel d'abus de biens sociaux et trafic d'influence". Il lui est reproché d'avoir perçu en 1998, via sa société de conseil ACA, 1,5 million de francs de Brenco - structure dirigée par M. Falcone - pour l'élaboration d'un "projet de microcrédits" en Angola.

    Outre que cette étude pourrait avoir été surfacturée, elle aurait également eu pour contrepartie des interventions de M. Attali en faveur de l'homme d'affaires. M. Attali serait intervenu dans le contentieux qui opposait aux services fiscaux la société slovaque ZTS-Osos, qui avait vendu pour 633 millions de dollars (696 millions d'euros) des armes au gouvernement angolais en 1993 et 1994. Considérant que Brenco était la représentation française de cette société spécialisée dans le matériel militaire - qui disposait d'un compte bancaire à Paris sur lequel M. Falcone disposait de la signature -, le fisc lui réclamait environ 3 milliards de francs.

    Pour contester ce redressement, l'avocat de M. Falcone, Me Allain Guilloux, lui-même mis en examen, s'efforça de démontrer que ZTS-Osos exerçait l'intégralité de ses activités à l'étranger. C'est dans ce contexte que M. Attali, également client de Me Guilloux, aurait introduit l'avocat auprès du ministre des affaires étrangères, M. Védrine, afin d'obtenir l'appui du Quai d'Orsay. Dans un procès-verbal de synthèse remis aux juges d'instruction le 12 octobre 2001, la brigade financière évoquait, notamment, "un déjeuner organisé au domicile de Jacques Attali" en septembre 1998 afin que ce dernier présente l'avocat à M. Védrine. "Au cours de ce rendez-vous, Me Guilloux -avait remis- au ministre un courrier du président angolais", notaient les policiers.

    En février 1999, Me Guilloux, toujours par l'entremise de M. Attali, fit parvenir à M. Védrine d'autres documents visant à établir que les poursuites diligentées par le fisc à l'encontre de ZTS-Osos n'étaient pas fondées. Selon les policiers, ces démarches auraient été couronnées de succès. "Les investigations, écrivent-ils, ont mis en évidence que le MAE -ministère des affaires étrangères- a pris en compte ces arguments et a demandé par un télégramme, daté du 18 mars 1999, à l'ambassadeur de France en Slovaquie de retourner les commandements de payer concernant la société ZTS-Osos afin que l'administration fiscale reconsidère sa position dans ce dossier."

    De fait, la sous-direction des conventions du ministère des affaires étrangères, qui avait adressé en août 1998 à l'ambassadeur de France à Bratislava deux commandements de payer, pour un montant total de 2 milliards de francs, devant être notifiés à ZTS-Osos, s'était ravisée sept mois plus tard. "Il apparaît que ce télégramme diplomatique du 11 mars 1999 est dépourvu de toute base légale. Cette décision (...) priv -ait- ainsi l'administration fiscale de toute possibilité de recouvrer des fonds auprès de la société de droit slovaque ZTS", estime la brigade financière. Selon les policiers, "informé de ces réactions du Quai d'Orsay (...), le cabinet du ministre de l'économie et des finances -Dominique Strauss-Kahn- a donné pour instruction, le 15 avril 1999, de suspendre toutes les poursuites à l'encontre de ZTS-Osos". Ils concluent que c'est seulement le 24 avril 2001, soit "bien après le début de -l-'enquête", ouverte en juin 2000, que le ministère des affaires étrangères décida de relancer la procédure à l'encontre de ZTS-Osos.

    Le 9 mars 2001, après une perquisition au Quai d'Orsay, M. Védrine avait affirmé n'être "jamais intervenu" en faveur de Pierre-Joseph Falcone. L'entourage du ministre avait ajouté que les documents qui avaient été adressés à M. Védrine par Me Guilloux n'avaient eu "aucune conséquence" (Le Monde du 12 mars 2001). Selon l'avocat de M. Attali, Me Jean-Michel Darrois, "l'audition de MM. Védrine et Moscovici confirmera ce que répète mon client, à savoir qu'il n'a jamais essayé d'obtenir un quelconque avantage fiscal en faveur de M. Falcone".
    Fabrice Lhomme, LE MONDE | 09.02.02 | 17h08, Le Monde 10/11 février 2002, p. 9

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    Mercredi 20 février 2002 : Affaire Falcone : Védrine et Moscovici seront entendus

    Le Conseil des ministres a autorisé le ministre des Affaires étrangères Hubert Védrine et celui des Affaires européennes Pierre Moscovici à être entendus comme témoins dans l’affaire Falcone.

    Les juges Philippe Courroye et Isabelle Prévost-Desprez veulent interroger les deux ministres pour savoir s’ils ont joué un rôle en 1998 pour tenter de résoudre un redressement fiscal de ZTS Ozos, la société de l’homme d’affaires Pierre Falcone, personnage central de l’affaire, remis en liberté début décembre après un an de détention provisoire.

    Jacques Attali, ancien conseiller du président Mitterrand, a été mis en examen en mars 2001 dans cette affaire pour « recel d’abus de biens sociaux et trafic d’influence ». La justice lui reproche d’avoir perçu environ 230.000 euros pour user de son influence auprès de M. Védrine afin de tenter de résoudre l’important contentieux avec le fisc de Pierre Falcone.
    La Nouvelle République du Centre Ouest, - 21.02.2002

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    Charlotte Rampling chez les juges

    SES INTERLOCUTEURS habituels sont plus souvent les réalisateurs, Claude Lelouch, Luchino Visconti, Yves Boisset et Woody Allen, que les magistrats. Pourtant, on vient d'apprendre que la célèbre comédienne Charlotte Rampling s'est rendue très discrètement, le 10 janvier dernier, dans le cabinet des juges d'instruction parisiens Philippe Courroye et Isabelle Prévost-Desprez, chargés du dossier des ventes d'armes à l'Angola, pour être entendue comme témoin. Son compagnon, Jean-Noël Tassez, est en effet mis en examen pour avoir reçu 1,1 million de francs (167 700 €) en liquide entre 1997 et 1999 de la part de Pierre Falcone, l'homme d'affaires au coeur du dossier. Les magistrats veulent comprendre pourquoi l'ancien patron de la Sofirad, aujourd'hui consultant en affaires, a perçu ces sommes. « Jean-Noël Tassez ne me tenait pas au courant de ses revenus et je n'étais pas au courant de ces remises d'argent », a expliqué la star, qui a confirmé aux juges que son compagnon aimait cacher son argent liquide dans les jaquettes de leurs nombreuses cassettes vidéo.

    Dettes de jeu
    « Après le début de l'affaire, il m'a expliqué qu'il avait reçu cet argent à cause de dettes de jeu. Il m'a d'ailleurs parlé d'un prêt, non pas d'un don », a-t-elle ajouté. Tassez, grand amateur de black jack, l'emmenait au casino d'Enghien, près de Paris. « Mais je lui avais conseillé d'arrêter de jouer : je sais bien qu'on ne gagne jamais à ce jeu-là. » Charlotte Rampling a confirmé avoir reçu 50 000 F (7 622 €) en liquide de la part de son compagnon, « à Noël ou pour son anniversaire », pour s'acheter une Mini Austin d'occasion. L'argent aurait aussi servi à payer la location d'une villa à Saint-Tropez, plusieurs étés de suite. Grâce à Jean-Noël Tassez, l'actrice a dîné plusieurs fois avec Pierre Falcone, un homme qu'elle décrit comme « très chaleureux » et « énergique », chez Lucas Carton et à la terrasse de Marius et Jeannette. Avec une quarantaine de personnes, le couple avait assisté, dans la loge de Falcone, à la finale de la Coupe du monde au Stade de France, en 1998. « Je n'ai jamais entendu parler de trafics d'armes, a encore expliqué Charlotte Rampling. D'ailleurs, je ne crois pas que Jean-Noël Tassez, qui a comme clients Thomson, Bayer, Alcatel, travaillait avec Pierre Falcone. » Pour l'avocate de Tassez, Sophie Bottai, « l'audition de Charlotte Rampling confirme en tous points celle de mon client ». C'est en toute discrétion que Charlotte Rampling s'est rendue le 10 janvier à la convocation des juges Courroye et Prévost-Desprez.
    Laurent Léger, Le Parisien, jeudi 28 février 2002, p. 14.

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    Le trafic d'armes vers l'Angola s'est poursuivi jusqu'à l'été 2000

    L'homme d'affaires Pierre-Joseph Falcone a été mis en examen une seconde fois pour "commerce illicite d'armes", le 27 mars. Courrier et documents semblent établir qu'il continuait à fournir Luanda en matériel militaire bien après la période 1993-1994, qui lui avait valu ses premières poursuites.

    Le trafic d'armes vers l'Angola se serait poursuivi au moins jusqu'à l'été 2000, soit au moment du déclenchement de l'enquête qui a valu à l'homme d'affaires Pierre-Joseph Falcone de passer un an en détention provisoire et à son associé, Arcadi Gaydamak, réfugié en Israël depuis décembre 2000, d'être visé par un mandat d'arrêt international. Jusqu'ici, l'enquête s'était centrée sur les ventes de matériel militaire au gouvernement angolais, en 1993 et 1994, pour un montant de 633 millions de dollars (696 millions d'euros). Les ventes d'armes avaient été effectuées par l'intermédiaire d'une société slovaque disposant d'un compte à la banque Paribas à Paris, ZTS-Osos - représentée en France, selon les enquêteurs, par Brenco, la société de M. Falcone.

    Les nouvelles découvertes effectuées par les policiers de la brigade financière ainsi que le retour de certaines commissions rogatoires ont conduit le juge parisien Philippe Courroye, qui instruit l'affaire avec Isabelle Prévost-Desprez, à mettre en examen une seconde fois Pierre-Joseph Falcone pour "commerce d'armes illicite", mercredi 27 mars.

    Cette nouvelle poursuite a été rendue possible après que le ministre de la défense, Alain Richard, sollicité par le parquet de Paris, eut déposé plainte, le 25 octobre 2001. Un décret de 1939 dispose que des poursuites pour trafic d'armes ne peuvent être engagées que "sur la plainte des ministres compétents". Le juge Courroye, qui a par ailleurs signifié à l'homme d'affaires une nouvelle mise en examen pour "abus de biens sociaux", l'a astreint au versement d'une caution de 5 millions d'euros. La remise en liberté de M. Falcone, le 1er décembre 2001, avait déjà été conditionnée au versement d'une caution record de 16 millions d'euros. M. Falcone a également été interrogé sur le rôle qu'il aurait joué dans la renégociation de la dette angolaise à la Russie et qui pourrait avoir donné lieu à des détournements de fonds.

    COURRIER "SECRET URGENT"

    Sur la foi de documents qu'ils ont saisis courant 2001 au domicile de l'ancienne secrétaire de M. Falcone, Isabelle Delubac, les enquêteurs semblent convaincus qu'à partir de 1997, la société Vast Impex a succédé à ZTS-Osos afin d'alimenter l'Angola en matériel militaire. MM. Falcone et Gaydamak auraient jugé la société slovaque trop " voyante" à un moment où le fisc mais aussi la presse - L'Evénement du Jeudi notamment - commençaient à s'y intéresser. Les policiers ont notamment mis la main sur plusieurs lettres adressées en 1999 et 2000 par des responsables angolais à M. Falcone ainsi qu'à l'ambassadeur angolais en France, Elisio de Figueiredo.

    Ces courriers font explicitement allusion à l'approvisionnement de l'Angola, par la société Vast Impex, en armes de guerre lourdes, pour au moins 100 millions de dollars : des chars d'assaut, des blindés, des missiles, du matériel d'aviation, des hélicoptères... Un document mentionne ainsi que 6 hélicoptères ont été facturés 15 millions de dollars. D'autres courriers semblent indiquer que le matériel a bien été livré. Il aurait été acquis par Vast Impex auprès de Promexport, l'une des principales entreprises russes spécialisées dans la livraison de matériel militaire. Les policiers ont également découvert au domicile de Mme Delubac la trace d'ordres de paiement au profit de Vast Impex datés du 14 février 2000, du 19 juin 2000 (pour un montant de 11,5 millions de dollars) et du 6 juillet 2000 - soit quatre jours avant que le parquet de Paris n'autorise les magistrats à enquêter sur la société ZTS-Osos.

    Parmi les courriers saisis figure aussi une lettre, adressée à M. Falcone le 21 septembre 1999 par le général Manuel Helder Vieira Dias Jr " Kopelipa", chef de la Maison militaire de la présidence de la République angolaise - l'équivalent du chef d'état-major du président de la République en France. Le général Kopelipa est réputé être l'homme de confiance du président José Eduardo Dos Santos pour tout ce qui concerne les livraisons d'armes. Barrée du tampon "SECRET URGENT", la missive indique : "Par la présente, je me permets d'accuser réception de votre fax du 21/09/1999. Je profite de l'opportunité qui m'est donnée pour vous demander de bien vouloir préciser davantage le calendrier de programmes de livraison de matériel, sur la base des pièces annexes que vous voudrez bien trouver sous ce pli. Je requiers toute votre compréhension et votre plus grande attention pour l'exécution des programmes de livraison, en effet, la "situation" exige que nous ayons le matériel le plus rapidement possible et dans un état opérationnel."

    La "situation" évoquée par le général fait sans doute référence à la reprise, en décembre 1998, après quatre ans d'interruption, de la sanglante guerre civile qui oppose depuis l'indépendance du pays, en 1975, les partisans du Mouvement pour l'autodétermination de l'Angola (MPLA) de M. Dos Santos à l'Union nationale pour l'indépendance totale de l'Angola (UNITA), dirigée par Jonas Savimbi - tué par l'armée le 22 février. Un cessez-le-feu devait toutefois être signé jeudi 4 avril.

    Interrogé par Le Monde, lundi 1er avril, l'avocat de M. Gaydamak, Me Gilles-William Goldnadel, a assuré que son client n'avait "rien à voir avec Vast Impex qu'il ne connaît même pas". "De toute façon, a-t-il ajouté, les livraisons d'armes qu'aurait effectuées cette société n'ont en aucune manière transité par l'Hexagone, la justice française n'est donc pas habilitée à enquêter sur ces faits." Me Goldnadel estime que "l'évocation par les enquêteurs de Vast Impex traduit leur inquiétude, à savoir que toute l'affaire, s'agissant de vente d'armes remontant à 1993 et 1994, risque d'être prescrite".

    "PRÉFINANCEMENT PÉTROLIER"

    Dès le 12 juin 2001, le juge Courroye avait questionné M. Falcone sur Vast Impex, notamment à propos d'un ordre de paiement à cette société de 1,6 million de dollars, intervenu le 16 novembre 1998. Les fonds provenaient d'un compte détenu par M. Falcone à la Banque internationale du Luxembourg (BIL). "Je ne vois pas à quoi correspond la société Vast Impex. [Cela] doit correspondre à un paiement de l'Etat angolais sur son instruction", avait indiqué M. Falcone, rappelant au magistrat que M. Gaydamak et lui-même avaient été officiellement mandatés par le régime de Luanda pour assurer son "préfinancement pétrolier". "Selon vos propres déclarations, le contrat ZTS-Osos de livraison d'armes se serait achevé en 1996. A quoi correspondrait ce paiement intervenant en 1998 ?", avait demandé le juge. "A des dettes qui seraient arrivées à maturité", avait répondu M. Falcone. "La société Vast Impex n'aurait-elle pas pris la suite de ZTS-Osos pour l'approvisionnement en armes de l'Angola ?", avait insisté M. Courroye. "Je n'en sais sincèrement rien du tout, seul l'Etat angolais pourrait répondre", avait conclu M. Falcone.
    Fabrice Lhomme, • LE MONDE | 02.04.02 | 12h01

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    Un dossier où apparaissent de nombreuses personnalités

    Pierre Falcone et Arcadi Gaydamak.

    Le 10 juillet 2000, les juges Prévost-Desprez et Courroye, qui instruisent une affaire de "blanchiment" impliquant l'avocat fiscaliste Allain Guilloux, enquêtent sur des faits de "fraude fiscale" visant Pierre-Joseph Falcone - client de Me Guilloux -, son associé Arcadi Gaydamak et la société slovaque de vente d'armes ZTS Osos. Le 1er décembre 2000, M. Falcone est mis en examen et placé en détention provisoire - il restera détenu un an. Un mandat d'arrêt est délivré à l'encontre de M. Gaydamak. La justice les soupçonne d'avoir vendu illégalement, via la société Brenco - qui serait une filiale de ZTS Osos -, 633 millions de dollars d'armes au gouvernement angolais, entre 1993 et 1994.

    Jean-Christophe Mitterrand.

    Les enquêteurs découvrent que M. Falcone a fait bénéficier de sa prodigalité intéressée de nombreuses personnalités, parmi lesquelles des proches de Charles Pasqua, un syndicat de magistrats ou encore Jean-Christophe Mitterrand. Le fils aîné de l'ancien président de la République, qui a perçu 1,8 million de dollars sur un compte en Suisse, est mis en examen le 21 décembre 2000. Autres bénéficiaires de la générosité de M. Falcone, l'ancien directeur général de la Sofirad, Jean-Noël Tassez, et l'auteur à succès Paul-Loup Sulitzer sont également poursuivis.

    Jacques Attali et Hubert Védrine.

    Le 8 mars 2001, l'ancien conseiller de François Mitterrand Jacques Attali, est poursuivi pour "recel d'abus de biens sociaux" et "trafic d'influence". Client de Me Guilloux, M. Attali, dont la société a bénéficié de fonds de Brenco pour une étude en Angola, est soupçonné d'être intervenu auprès du ministre des affaires étrangères, Hubert Védrine, pour freiner des investigations fiscales sur Brenco et ZTS Osos. M. Védrine a été interrogé comme témoin le 21 mars 2002.

    Charles Pasqua et Jean-Charles Marchiani.

    Le 19 avril 2001, le parquet de Paris ouvre deux informations judiciaires visant Charles Pasqua et le financement du RPF qu'il préside. En mai, M. Pasqua est mis en examen pour "financement illégal de campagne électorale", mais aussi dans l'affaire Falcone : une association dont il est proche a bénéficié de virements de Brenco. Soupçonné d'avoir perçu des fonds de M. Falcone, l'homme de confiance de M. Pasqua, le député européen Jean-Charles Marchiani, est poursuivi.
    LE MONDE | 02.04.02 | 12h01, ARTICLE PARU DANS L'EDITION DU 03.04.02

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    Hubert Védrine s'en prend à Jacques Attali

    INTERROGÉ comme témoin par le juge Philippe Courroye le 21 mars dernier (2002) pendant 6 heures, Hubert Védrine a « lâché » son ami Jacques Attali. Le magistrat voulait savoir comment l'énorme redressement fiscal visant une société de vente d'armes a pu être arrêté grâce au ministère des Affaires étrangères et à Bercy. Depuis 1997, en effet, le fisc réclame plus de 300 millions d'euros (2 milliards de francs) à la société ZTS Osos qui a vendu des armes à l'Angola grâce aux hommes d'affaires Pierre Falcone et Arcadi Gaydamak. Installée en Slovaquie, cette société devrait, selon Bercy, payer des impôts en France.
    Les juges soupçonnent Jacques Attali, le célèbre écrivain touche-à-tout, d'être intervenu auprès du Quai d'Orsay et des Finances pour le compte de l'avocat de Pierre Falcone et de ZTS Osos, Allain Guilloux. Objectif : faire en sorte que le redressement fiscal soit abandonné. Toujours est-il que le ministère des Affaires étrangères ordonne en mars 1999 qu'on cesse de réclamer 2 milliards à la société slovaque, avant de relancer les poursuites en avril 2001… un mois après la perquisition des juges au ministère ! Attali et Guilloux ont été mis en examen pour « trafic d'influence ».

    « Il aurait mieux fait de s'abstenir »
    « Je préfère Attali l'intellectuel à celui qui fait ce genre de démarches », a asséné Hubert Védrine, dans sa déposition encore inédite. Invité à déjeuner chez Attali le 28 septembre 1998, il fait la connaissance d'Allain Guilloux. « Attali m'avait expliqué qu'Allain Guilloux était l'avocat du président angolais Dos Santos qui avait un problème avec Bercy. Je ne crois pas qu'il ait employé les mots redressement fiscal. » L'avocat lui remet un pli contenant une note du président angolais, une démarche que Védrine trouve « bizarre », mais il ne dit rien et répond : « Je verrai. »
    Devant le juge, il s'étonne d'avoir reçu la note par le canal de l'avocat : « Si cela avait concerné la diplomatie, il y avait d'autres circuits comme l'ambassade d'Angola en France, ou notre ambassadeur en Angola. Je ne vois pas pourquoi on est venu me chercher dans cette affaire. » Il affirme ne jamais avoir entendu parler de Falcone et Gaydamak avant les premiers articles, fin 2000. Après le fameux déjeuner, « Allain Guilloux nous a harcelés de courriers. Par intuition j'ai compris qu'il ne fallait pas se mêler de cette histoire ».

    Jacques Attali, que Védrine a connu en 1973 dans les groupes d'experts de Mitterrand, n'a plus la cote : « Il aurait mieux fait de s'abstenir. » « J'ignorais qu'Attali était en relations d'affaires avec ces gens et qu'il avait reçu 160 000 dollars de Brenco (NDLR : une société de Falcone, pour une étude). Si je l'avais su avant, je ne serais même pas allé déjeuner chez lui. » Et d'enfoncer le clou : « J'ai complètement cloisonné les deux fonctions de Jacques Attali, consultant privé d'un côté, et le rapport sur l'élargissement de l'Europe que je lui avais confié, de l'autre. » L'arrêt des réclamations fiscales ? « Il n'y a eu aucune instruction de mon cabinet ou de moi-même. » Et leur reprise deux ans plus tard ? Idem.

    Entendu à son tour le 2 avril (2002), Pierre Moscovici, ministre des Affaires européennes, a assuré ne rien connaître de ce litige fiscal.
    Laurent Léger, Le Parisien, samedi 13 avril 2002, p. 15.

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    Pierre Falcone inculpé en Suisse pour "blanchiment" dans l'affaire du règlement de la dette angolaise

    L'homme d'affaires Pierre Falcone, mis en examen à plusieurs reprises dans l'enquête sur les ventes d'armes vers l'Angola, conduite par les juges parisiens Philippe Courroye et Isabelle Prévost-Desprez, est désormais poursuivi par la justice suisse. Le 23 avril, dans le cadre d'une commission rogatoire internationale, le juge genevois Daniel Devaud lui a signifié, dans le cabinet de M. Courroye, son inculpation pour "blanchiment d'argent", "soutien à une organisation criminelle"et "corruption d'agents publics étrangers". M. Falcone se voit reprocher d'avoir agi, "de concert" avec Arcadi Gaydamak - son associé, visé par un mandat d'arrêt depuis décembre 2000 -, José Eduardo Dos Santos, Joaquim David et Elisio de Figueiredo - respectivement président, ministre de l'industrie et ambassadeur itinérant de la République d'Angola -, "dans le cadre d'une organisation secrète œuvrant entre Genève, Moscou et Luanda et poursuivant le but de se procurer des revenus illicites par les moyens criminels tels que la corruption et la gestion déloyale des intérêts publics".

    Selon l'exposé des charges établi par M. Devaud et figurant dans l'interrogatoire de première comparution de M. Falcone, ce dernier aurait mis en place "une structure utilisant des sociétés écrans, notamment la société Abalone Investment Limited, destinée à soutirer au préjudice de la République d'Angola, voire de la Fédération de Russie, des ressources financières lui revenant". L'exposé du magistrat helvétique mentionne explicitement le "versement de commissions illicites"à MM. Dos Santos, de Figueiredo et David, ainsi qu'à une autre personnalité de l'Etat angolais, José Leitao Da Costa, ministre du bureau de la présidence et secrétaire du conseil des ministres.

    Le juge Devaud enquête sur le règlement, entre 1996 et 2000, de la dette de l'Angola à la Russie, qui aurait donné lieu à des détournements de fonds évalués à 614 millions de dollars. Le ministère des finances russe n'aurait touché, pendant cette période, que 161 millions de dollars sur les 773,9 millions payés à Abalone Investment Limited, la société agissant comme intermédiaire dans le recouvrement de la dette et dont les ayants droit sont Arcadi Gaydamak et Pierre Falcone. S'élevant à l'origine à 5 milliards de dollars, cette dette - héritage de l'époque soviétique - avait été réduite de 70 % grâce à un accord conclu en novembre 1996, aux termes duquel l'Angola s'était engagé à rembourser 1,5 milliard de dollars à la Russie sous forme de billets à ordre, d'ici à 2016.

    La justice suisse est parvenue à identifier une partie des 614 millions de dollars susceptibles d'avoir été détournés : environ 120 millions de dollars auraient été reversés à M. Falcone et 60 millions de dollars à M. Gaydamak. Joaquim David, ancien président de Sonangol - compagnie nationale des combustibles angolais - et aujourd'hui ministre de l'industrie, aurait perçu 4 millions de dollars (en deux virements, le 12 mars et le 6 octobre 1997), tandis que José Leitao Da Costa aurait touché 3 millions de dollars, le 6 juillet 2000. Selon le juge Devaud, plus de 40 millions de dollars, versés entre le 3 octobre 1997 et le 15 janvier 1998 depuis le compte Abalone à l'UBS de Genève sur un compte ouvert au Crédit agricole Indosuez, au Luxembourg, ont "vraisemblablement" eu pour destinataires MM. de Figueiredo et Dos Santos.

    Les magistrats français, quant à eux, ont été destinataires, en mars, de signalements Tracfin (service antiblanchiment du ministère des finances français) ayant permis d'établir que M. Falcone avait ouvert en 1998 des comptes au nom de trois sociétés de droit panaméen (Dramal, Camparal et Tutoral), à la banque internationale du Luxembourg (BIL). Selon Tracfin, les "bénéficiaires économiques" de ces comptes seraient, outre M. Falcone lui-même, MM. de Figueiredo et Dos Santos (Le Monde du 3 avril).

    Interrogé sur ce point le 27 mars (2002) par le juge Courroye, M. Falcone s'est "inscrit- en faux contre -l'- affirmation de Tracfin". "En aucune façon je n'ai ouvert un compte pour M. Dos Santos", avait-il précisé. Dans un entretien accordé au Monde du 16 avril, M. Falcone avait évoqué, à propos de la note Tracfin, "une tentative de déstabilisation" du gouvernement angolais. Au sujet du compte à la BIL, dont M. de Figueiredo aurait été l'ayant droit, M. Falcone a déclaré au juge Courroye : " J'imagine qu'il avait des missions bien spécifiques -...- dans l'intérêt de son pays." L'ambassadeur aurait également perçu 18,8 millions de dollars sur un compte ouvert à la Discount Bank aux îles Caïmans.

    Au cours de son interrogatoire de première comparution, le 23 avril, M. Falcone, qui a "contest-é- formellement l'intégralité des faits qui -lui- sont reprochés", a toutefois refusé de s'expliquer, affirmant qu'il n'avait pas eu "le temps matériel" de prendre connaissance de la commission rogatoire internationale du juge Devaud. Les avocats de M. Falcone estiment d'autre part que les procédures française et suisse sont entachées d'irrégularités. "Les juges Courroye et Devaud se sont échangé des documents de manière "sauvage", dans un cadre non officiel", a déclaré au Monde M. Falcone, qui y voit "une preuve supplémentaire de la manipulation judiciaire" dont il se dit victime. "Même la justice suisse, fait exceptionnel, vient de le reconnaître", a-t-il ajouté.

    M. Falcone fait allusion à une ordonnance de la chambre d'accusation du canton de Genève qui, le 16 avril, a admis le recours formé par M. Falcone, qui contestait la transmission par M. Devaud à M. Courroye de pièces le concernant. Dans son ordonnance, la chambre d'accusation indique : "S'il est légitime que, dans le cadre d'une commission rogatoire concernant une procédure nationale, le juge chargé de l'exécution puisse avoir connaissance des documents nécessaires à cette exécution, il n'est pas légitime qu'il puisse utiliser, dans sa propre enquête, des documents qui ne lui ont pas été transmis par la voie légale. Or -...-, les documents communiqués au juge français dans le cadre de la procédure nationale -suisse- ont également été saisis dans le cadre de la procédure -française-, d'où un risque évident de confusion." Le 3 mai, le président de la chambre d'accusation de Genève a demandé à l'Office fédéral de la justice - la chancellerie suisse - d'"attire -r- l'attention des autorités françaises" sur le fait que certaines pièces transmises par M. Devaud à M. Courroye ne sauraient être utilisées.
    Fabrice Lhomme, ARTICLE PARU DANS L'EDITION DU 24.05.02, p. 12, LE MONDE | 23.05.02 | 16h08

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    L'hôtesse d'accueil faisait aussi le « ménage »

    L'ENQUÊTE sur un trafic d'armes vers l'Angola amène le juge Courroye à s'intéresser à un réseau d'hôtesses parisiennes. Les jeunes femmes, recrutées généralement pour des week-ends, étaient chargées de participer à des dîners d'affaires et elles étaient souvent payées en espèces par Brenco, la société de Pierre Falcone. Emmanuelle D., chargée de recruter ces hôtesses, a déjà été mise en examen dans l'enquête sur le trafic d'armes. Mais le juge Courroye vient également de mettre en examen, pour recel d'abus de biens sociaux, Mélanie, une ancienne hôtesse de Brenco. Interrogée le 16 avril dernier, cette femme de 31 ans a révélé comment elle avait été chargée, à deux reprises, de « faire le ménage » dans les archives de la société de Falcone. Un témoignage embarrassant pour l'homme d'affaires. Mélanie a travaillé deux ans chez Brenco entre 1997 et 1999. Elle est soupçonnée, en marge de ses salaires comme hôtesse d'accueil, d'avoir perçu 30 490 € (200 000 F) en espèces et 13 263 € (87 000 F) pour l'achat d'une voiture.

    « Certaines personnes venaient chercher de l'argent »

    Devant le juge, elle a raconté qu'elle recevait dans les locaux de la société de Pierre Falcone, des « visiteurs réguliers » et cite les principaux « mis en examen » du dossier : Jean-Christophe Mitterrand, qu'elle a vu « une bonne vingtaine de fois environ », mais aussi Jacques Attali, Jean-Charles Marchiani, et Paul-Loup Sulitzer, le romancier homme d'affaires également mis en examen. « J'ai compris au fil du temps que certaines personnes venaient chercher de l'argent », confie-t-elle.
    L'hôtesse se souvient d'une anecdote : « J'avais retrouvé une enveloppe aux toilettes après le passage de Paul-Loup Sulitzer qui avait rencontré immédiatement avant M. Falcone. J'en ai donc déduit qu'il était allé recompter l'argent aux toilettes… D'ailleurs, ajoute-t-elle, tous les employés de Brenco disaient qu'un certain nombre de gens touchaient de l'argent en espèces. » Une confirmation de l'enquête du juge Courroye.
    Mais Mélanie révèle aussi deux épisodes de « nettoyage » jusque-là inconnus. « La première fois, il s'agissait de rechercher au sous-sol, dans la cave, des documents à entête de ZTS Osos (la société tchèque qui vendait les armes en Angola). Nous avons cherché dans des classeurs et dans des cartons. » L'hôtesse se souvient alors qu'Isabelle Delubac, la secrétaire personnelle de Pierre Falcone, a mis la main ce jour-là sur les documents retrouvés. « Elle avait l'air pressée », dit-elle au juge. « La deuxième fois, poursuit Mélanie, qui situe l'épisode en 1998, Isabelle Delubac nous avait prévenues qu'on allait avoir de la visite. Elle nous a demandé de vider les armoires au premier étage. » Mélanie se souvient alors avoir « rempli des cartons avec des noms de pays, Angola, Amérique du Sud… Nous avons fait cela un soir, et peu de temps après il y a eu une autre perquisition. » Les dirigeants de Brenco avaient-ils été prévenus ?
    Laurent Valdiguié, Le Parisien, vendredi 31 mai 2002, p. 23

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    AFFAIRES Le rapport confidentiel de la police judiciaire détaille les relations entre l'homme d'affaires Pierre Falcone, Charles Pasqua et Jean-Charles Marchiani

    Pierre Falcone et Charles Pasqua. Cette synthèse montre le rôle du ministère de l'Intérieur, en 1993 et 1994, qui permit la vente d'armes à l'Angola, attitude en contradiction avec la ligne du gouvernement Balladur qui avait officiellement exclu toute vente de matériel militaire au régime du président Eduardo Dos Santos. (DR)

    Affaire Falcone : le rapport secret Le document a été transmis avant l'été aux juges Philippe Courroye et Isabelle Prévost-Desprez, en charge de l'affaire dite des ventes d'armes à l'Angola. Intitulé Synthèse des investigations relatives aux relations entre messieurs Pierre Falcone, Arcadi Gaydamak, Charles Pasqua et Jean-Charles Marchiani, ce rapport de 19 pages signé de Noël Robin, le patron de la brigade financière, met au jour près de deux années d'enquête sur les liens présumés entre les quatre principaux protagonistes du dossier.

    «Cette mise en perspective de 1993 à 2000, de l'ensemble des éléments concernant les relations entre les intéressés, s'attache à dégager la logique des intérêts communs qui a prévalu entre messieurs Charles Pasqua et Jean-Charles Marchiani – qui ont soutenu politiquement les contrats de ventes d'armes initiés entre 1993 et 1994 – entre Pierre Falcone, Arcadi Gaydamak et l'Angola. Les profits des contrats ayant ensuite contribué, jusqu'à l'année 2000, à financer tout à la fois le train de vie de Jean-Charles Marchiani mais aussi l'activité politique de ce dernier et de Charles Pasqua», est-il ainsi écrit en introduction du rapport.

    Claire et minutieuse, cette synthèse, demeurée confidentielle à ce jour, montre tout d'abord le rôle du ministère de l'Intérieur, en 1993-1994, alors dirigé par Charles Pasqua, pour permettre la vente d'armes à l'Angola. Une attitude en totale contradiction avec la ligne du gouvernement d'Edouard Balladur qui avait officiellement exclu toute vente de matériel militaire au régime du président Eduardo Dos Santos. Les policiers font d'ailleurs état de plusieurs notes en ce sens, dont une émanant d'Alain Juppé, alors ministre des Affaires étrangères.

    Dans ce contexte politique, le rapport souligne qu'un homme au sein du ministère de l'Intérieur a joué un rôle clé pour permettre la signature du contrat d'armes entre la société de Pierre Falcone et Arcadi Gaydamak et le gouvernement angolais: Jean-Charles Marchiani, proche conseiller de Charles Pasqua. Quelques jours avant la finalisation de l'opération, c'est d'ailleurs lui qui se rend discrètement en Angola, aux frais de Pierre Falcone. Le rapport de la brigade financière précise à ce sujet que «Charles Pasqua n'ignorait rien des missions à Luanda de son conseiller».

    Mais cette intervention politique n'est apparemment pas restée vaine. Toujours d'après le rapport, une double contribution financière aurait été accordée en retour par les hommes d'affaires Pierre Falcone et Arcadi Gaydamak: à Jean-Charles Marchiani personnellement et à Charles Pasqua politiquement. Aux billets d'avions, séjour à l'île Maurice, multiples versements en espèces dont aurait bénéficié l'ancien préfet du Var, les enquêteurs ajoutent un compte à l'étranger par lequel 1,2 million de francs aurait transité. Mieux encore, à en croire un document manuscrit saisi au domicile de Jean-Charles Marchiani, «il apparaît qu'en 1992 et 1993 un dénommé CP est intéressé au fonctionnement de ce compte et a perçu la somme totale de 700 000 francs». Ce compte, que les enquêteurs n'ont pas localisé, ainsi que la véritable identité de CP devraient faire l'objet d'autres investigations.

    Aux soupçons d'enrichissement personnel de Jean-Charles Marchiani, le rapport détaille enfin les éléments de l'enquête accréditant l'hypothèse d'un financement politique.

    Par sa construction et la précision des détails apportés, le rapport est accablant. Pour autant, depuis le début des investigations – ce que les policiers ne manquent d'ailleurs pas de souligner –, Charles Pasqua et Jean-Charles Marchiani ont toujours démenti avec la plus grande fermeté être impliqués dans les ventes d'armes à l'Angola et contesté encore plus vigoureusement avoir touché le moindre franc de Pierre Falcone et Arcadi Gaydamak. Une défense qui apparaît aujourd'hui de plus en plus fragile.
    Le Figaro, Eric Decouty [17 août 2002]

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    Intermédiaires planétaires
    Falcone et Gaydamak poursuivis pour le rachat de la dette de l'Angola à la Russie.

    Quand ils ont des ennuis, c'est en grand. Déjà empêtrés à Paris dans une colossale vente d'armes à l'Angola ­ pour 463 millions de dollars (autant d'euros) ­, les «intermédiaires» Pierre Falcone et Arcadi Gaydamak doivent désormais s'expliquer en Suisse sur leur opération de rachat de la dette angolaise à l'Etat russe, soit 1,5 milliard de dollars.

    Pierre Falcone a été mis en examen sur ce dossier, le 23 avril, pour «blanchiment d'argent, soutien à une organisation criminelle et corruption d'agents publics étrangers» par le juge suisse Daniel Devaud. Courant septembre, le magistrat genevois a reçu une demande de constitution de partie civile des mains de l'un des défenseurs de la Chambre des comptes russe, présidée par Sergueï Stepachine. Cette démarche, révélée par le quotidien le Temps, est un sérieux revers pour les intermédiaires qui clament haut et fort qu'ils n'ont fait que rendre service à deux Etats en difficulté. En l'état actuel de l'enquête, il apparaît en effet que la fédération de Russie n'a reçu que 161 millions de dollars, soit moins de 15% de la somme qu'elle est en droit d'attendre. Mais jusqu'à présent aucune plainte, côté russe, n'avait encore été déposée. En mai, une délégation de la Chambre des comptes s'était rendue à Genève afin d'étudier le dossier.

    Déballage.
    L'avocat d'Arcadi Gaydamak, Me William Goldnadel, a mis en doute, vendredi, la validité de la démarche engagée, ainsi que le mandat de l'avocat suisse. «La Cour des comptes de Russie n'a aucune possibilité de se porter partie civile en lieu et place de la Fédération de Russie» a déclaré Me Goldnadel à Libération. Le débat n'est pas tranché. La Chambre des comptes russe ­ qui a donné un mandat général à Me Martin Schwartz ­ n'est pas la seule à s'être manifestée. Le ministère des Finances russe, directement impliqué dans le règlement de la dette ­ et représenté par un autre avocat, Me Maurice Harari ­ pourrait ne pas goûter le déballage.

    Le dossier de renégociation de la dette a laissé les Suisses pantois. Ni Falcone, ni Gaydamak ne sont issus de la finance internationale. L'un a fait Sciences po à Aix-en-Provence avant de démarrer dans la commercialisation de sardines. L'autre a quitté Moscou très jeune pour se lancer dans la traduction. Ils ont donc appris sur le tas. Leur première grosse affaire, les armes pour l'Angola, s'est faite, en 1994, grâce à leurs connexions politiques ­ réseaux Pasqua pour Falcone, services spéciaux russes pour Gaydamak. Cette vente a introduit solidement les deux «faciliteurs», selon l'expression de Gaydamak, auprès des autorités angolaises, sur le diamant comme sur l'agroalimentaire. Forts d'un mandat du ministère du Plan angolais, les deux amis renégocient donc à la baisse, en 1996, la dette du pays africain auprès de la Russie. D'un montant initial de 5 milliards, celle-ci est ramenée à 1,5 milliard dans le contrat de règlement signé par les deux Etats. Mais entre les deux pays, il y avait désormais Abalone ­ une société de Falcone et Gaydamak, fondée tout spécialement à Genève.

    Pour rembourser sa dette, la banque centrale d'Angola a émis 31 billets à ordre de 48,7 millions de dollars chacun à l'intention des Russes. Abalone s'entremet. Elle obtient auprès des Angolais un contrat de livraison de pétrole pour 1,5 milliard de dollars, qui doit lui permettre de rembourser la Russie. Quand l'argent du pétrole arrive ­ 775 millions de dollars sont engrangés par Falcone et Gaydamak. Mais Abalone ne rembourse que six billets à ordre aux Russes, pour 161 millions de dollars. Et comme au bonneteau, on ne sait plus sous quel verre est passé l'argent.

    Les juges suisses eux le voient. Ils s'aperçoivent que certains fonds revenant aux Russes ont été répartis sur d'autres comptes. Gaydamak aurait encaissé 130 millions de dollars, Falcone, 60, un banquier russe partenaire des deux amis, 48. Montants que les associés présentent comme des «profits légitimes dégagés par le trading».

    Plaintes.
    Mais les sommes versées à des personnalités angolaises ou leurs sociétés sont plus difficiles à justifier. Surtout quand il s'agit de Jose Eduardo Dos Santos, le président angolais lui-même, de Jose Leitao Da Costa, ministre du bureau de la présidence, d'Eliseo de Figuereido, l'un de ses ambassadeurs itinérants et de Joaquim David, ex-président de la compagnie pétrolière angolaise Sonangol. Le 24 mai, le président Dos Santos a d'ailleurs écrit au président de la Confédération helvétique pour se plaindre «des actes pratiqués par le juge Daniel Devaud», «manifestation claire» selon lui, «d'arrogance et d'abus de pouvoir». En 2001, Dos Santos avait déjà écrit à Jacques Chirac pour prendre la défense de «son mandataire Pierre Falcone» et lui demander un retrait des plaintes. En Suisse, Pierre Falcone a tenté moult fois de se présenter en «mandataire» des Angolais. La dernière fois, en mars, en tentant de s'opposer, sans succès, à la transmission à la France des mouvements de ses 18 comptes bancaires en Suisse dans l'affaire de la vente d'armes.
    Libération, Par Karl LASKE, 5 et 6 octobre 2002, page 18

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    15 octobre 2002 : Pierre Falcone retourne en prison

    PIERRE FALCONE retourne à la case prison. Déjà incarcéré pendant un an à Fleury-Mérogis dans le cadre de l'enquête sur le trafic d'armes présumé avec l'Angola, l'homme d'affaires dort depuis mardi soir à la prison de la Santé, cellule 131, celle laissée vacante la semaine dernière par Jacques Crozemarie. Pourquoi ce retour ? Le juge de la détention, Philippe Jean-Draeher, estime que Pierre Falcone n'a pas respecté son contrôle judiciaire et lui reproche d'avoir rencontré une des quarante et une personnes avec lesquelles tout contact lui était interdit. « Il s'agit d'une simple bévue involontaire », plaident les avocats de Falcone, qui ont aussitôt enclenché une demande de référé-liberté. A l'occasion d'une perquisition récente au domicile de Paul Anselin, un élu de Bretagne, les policiers tombent sur une carte de Pierre Falcone, partiellement déchirée, avec l'adresse de l'homme d'affaires avenue Montaigne et l'étage de son appartement. Dans la foulée de la perquisition, Paul Anselin, actuel maire de Plöermel et conseiller régional de Bretagne, et ancien « consultant » de Brenco, la société de Pierre Falcone, est mis en examen pour recel d'abus de biens sociaux. Il lui est reproché d'avoir bénéficié de largesses de Brenco, notamment d'une voiture et d'un chauffeur, pour une somme de 1,9 MF. « Et alors ! » réplique vivement Paul Anselin, qui nie farouchement tout délit et « tout contact avec l'Angola », mais admet avoir « travaillé pour Pierre Falcone au Mexique ». « Je suis otage de ce dossier ! s'emporte-t-il. J'ai été payé pour un travail effectué, et, en tant qu'officier de l'armée française, je n'ai rien à me reprocher », poursuit cet ancien de Saint-Cyr, compagnon d'armes de Jacques Chirac pendant la guerre d'Algérie, à qui le président, en janvier 1957, « avait personnellement sauvé la vie ». Et la carte de visite de Falcone retrouvée chez lui ? « J'ai effectivement vu Pierre Falcone à ma demande cet été pour lui présenter mes condoléances à la suite de la mort de son père », nous indique Paul Anselin, 71 ans, qui ajoute « avoir ignoré » que cette rencontre était « interdite ».

    « Il est tombé des nues »

    C'est le hic. En reconnaissant avoir rencontré l'homme d'affaires, l'ancien militaire, même s'il ignorait l'interdiction, signe l'infraction. Convoqué mardi après-midi par le juge Courroye, Pierre Falcone voit son contrôle judiciaire révoqué. « Il est tombé des nues », confie M e Christian Charrière-Bournazel, un des avocats de Falcone. « D'accord, il n'aurait pas dû voir M. Anselin, qui est à la périphérie de ce dossier, mais ce rendez-vous n'avait aucun rapport avec l'enquête, et la sanction est totalement disproportionnée », plaide l'avocat. Plus incisif, M e Charrière-Bournazel s'interroge sur « les mobiles de cette incarcération » et se « demande s'il ne s'agit pas de relancer une enquête enlisée. » Les avocats de l'homme d'affaires espèrent qu'il sortira de prison « d'ici à la fin de la semaine ».
    Laurent Valdiguié, Le Parisien , mercredi 16 octobre 2002, page 19

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    Pierre Falcone remis en liberté
    La chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris a ordonné vendredi (25 octobre 2002) la remise en liberté de l'homme d'affaires Pierre Falcone, personnage central d'une affaire de trafic d'armes présumé vers l'Angola, a indiqué l'un de ses avocats, Me Yves Lévy, à l'Agence France Presse.
    Pierre Falcone, qui a déjà été écroué durant un an dans le cadre de cette affaire, avait été de nouveau placé en détention provisoire le 14 octobre pour non-respect de son contrôle judiciaire.
    "La cour d'appel a reconnu le caractère disproportionné de la sanction", a estimé Me Lévy."C'est un désaveu sur la façon dont cette affaire est instruite", a-t-il ajouté, précisant que son client, écroué à la prison parisienne de la Santé, sortirait "en milieu de journée".
    LCI, vendredi 25 octobre 2002 - 11h19

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    Témoignage accablant contre l'ex-préfet Marchiani

    C'EST UN TÉMOIGNAGE accablant contre Jean-Charles Marchiani. Yves Manuel, un homme d'affaires de 76 ans, a raconté au juge Courroye comment l'ancien préfet du Var aurait bénéficié de commissions occultes. Mis en examen pour recel d'abus de biens sociaux dans le dossier Falcone, Yves Manuel a évoqué le rôle de l'ancien préfet dans des opérations en marge de l'enquête. Un récit brutal, que dément de bout en bout Jean-Charles Marchiani, évoquant « une manipulation ».
    « Il fallait rester discret »
    Yves Manuel, assisté ce jour-là de M e Bernard Gorny, commence par détailler devant le juge Courroye ses relations avec Marchiani et Falcone. « J'ai effectivement vu l'évolution de Pierre Falcone, qui est passé d'un petit bureau avenue Hoche à cet hôtel particulier avenue Kléber, et je considérerais cette évolution comme fulgurante », dit-il. Voisin d'immeuble de Jean-Charles Marchiani, dans le VIIe arrondissement de Paris, Yves Manuel est persuadé que ce dernier « était parfaitement informé des activités de vente d'armes de Pierre Falcone ». Manuel décrit les deux hommes comme des « gens qui sont sympathiques au premier abord, qui vous embobinent. Et on se réveille un jour avec un grand coup sur la tête ». Il indique aussi « qu'il fallait rester discret sur leurs relations, que ce n'était pas très bon pour l'image de marque de M. Pasqua ».

    « J'étais l'écran »

    L'homme d'affaires en vient ensuite au coeur de son témoignage. « Cela devait être en 1994 ou 1995. Pierre Falcone nous avait donné rendez-vous à la brasserie le Suffren. Il a dit devant M. Marchiani et moi qu'il mettait 5 millions de dollars à disposition de Jean-Charles Marchiani. » A l'époque, Falcone lui précise que cette somme est destinée à « financer la protection et le coût d'une délégation zaïroise qui viendrait en Angola ». Mais devant le juge Courroye, avec sept ans de recul, Yves Manuel doute de cette version. « J'ai parfaitement compris qu'on me demandait d'être l'écran », dit-il. Sur les 5 millions versés par Falcone sur les comptes suisses de Manuel, 3 millions repartent sur un compte de Jean-Charles Marchiani à la banque Indosuez. « Je pense effectivement, au fond de moi-même, que Jean-Charles Marchiani et Pierre Falcone se sont moqués de moi, dit-il au juge. Il y avait d'autres intérêts à la clé. » En clair, Yves Manuel pense que l'opération de sécurité entre le Zaïre et l'Angola évoquée devant lui pour justifier le versement « n'a jamais eu lieu » et que les fonds étaient destinés au préfet du Var. Réaction de Jean-Charles Marchiani : « Yves Manuel parle sous la dictée. »

    « Une perquisition le lendemain »

    Autre volet du témoignage d'Yves Manuel, les coulisses d'une perquisition opérée en 1996. « Je dînais avec des amis américains chez Edgar. Marchiani m'a appelé sur mon portable. Il m'a dit que je devais prévenir Pierre Falcone d'une perquisition qui allait intervenir chez lui le lendemain. Il devait être 23 heures… L'objet de l'appel de Marchiani était de les prévenir pour que le ménage soit fait. Selon moi, il a dû être informé de cette perquisition par les services . » Yves Manuel, son repas terminé, se rend dans les locaux de Falcone, à deux pas du restaurant. « Il régnait une certaine agitation », raconte-t-il au magistrat. Selon lui, plusieurs employés de Falcone sont présents et se livrent à des « recherches », notamment sur des disquettes informatiques. Réaction de l'ancien préfet du Var : « Je n'ai aucun souvenir de cet éventuel coup de fil. »

    « Il est devenu fou »

    Le juge interroge ensuite Yves Manuel sur ses rencontres récentes avec Falcone et Marchiani. « Jean-Charles Marchiani est venu me voir à mon domicile, poursuit Manuel, la scène se situant en octobre dernier. Il m'a dit qu'il avait organisé un rendez-vous par ses avocats entre Pierre Falcone et moi. Il m'a dit que je devais demander à Pierre Falcone qu'il finance son ou ses avocats. Je lui ai dit que c'était extrêmement gênant et il a insisté… Il semble qu'il avait des difficultés financières, ce qui m'a surpris. » Yves Manuel raconte avoir ensuite rencontré Pierre Falcone dans le hall d'un hôtel parisien. « Il était très surpris de cette demande. Il m'a dit que Marchiani était devenu fou. » Réaction ironique de l'intéressé : « Je serais effectivement devenu fou si j'avais fait cela. » Le juge Courroye, qui a réclamé la levée de son immunité de député européen, devrait prochainement interroger Marchiani.
    Laurent Valdiguié, Le Parisien, samedi 18 janvier 2003, p. 17

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    (Septembre 2003) Immunité diplomatique pour Pierre Falcone

    Selon "Le Monde", l'homme d'affaires, figure centrale d'un trafic d'armes présumé vers l'Angola, a été nommé conseiller à la délégation angolaise à l’Unesco. Il bénéficie à ce titre d'une immunité totale.
    Pierre Falcone n’a-t-il plus rien à craindre de la justice française ? C’est ce qui ressort apparemment des révélations du Monde dans son édition de samedi (20 septembre 2003). L'homme d'affaires, personnage central d'une affaire de trafic d'armes présumé vers l'Angola et placé sous contrôle judiciaire, a été nommé ministre de l'Angola à l'Unesco et bénéficie ainsi de l'immunité diplomatique. Nommé ministre conseiller à la délégation permanente de l'Angola "à la mi-juin", selon son avocat, il s'est fait remettre jeudi sa plaque diplomatique à l'ambassade d'Angola à Paris. Il pourrait quitter la France prochainement.
    "Il n'a pas revu sa famille depuis trois ans, mais il ne souhaite pas que cette nomination soit assimilée à un stratagème pour fuir ses responsabilités. Il entend répondre aux convocations de la justice", a affirmé son avocat Me Lévy. "Normalement, estime Me Lévy, Pierre Falcone ne pourrait plus être convoqué par la justice, mais il ne se dérobera pas". L’avocat a ajouté que son client "n'avait été convoqué que deux fois en deux ans, et encore pas sur le fond du dossier". En ce qui concerne sa nomination, Me Lévy estime qu'il "s'agit de la part de l'Angola d'un acte politique fort qui vient confirmer que Pierre Falcone a toujours agi au nom de la République d'Angola", "ce que (son client) ne cesse de clamer".
    Les soupçons pesant sur Pierre Falcone
    Les ministres plénipotentiaires auprès de l'Unesco bénéficient d'une immunité totale, conformément à un accord signé en 1954 entre la France et l'organisation des Nations-Unies pour l'éducation et la culture, dont le siège est à Paris. Du côté du quai d'Orsay, on affirme "être lié par l'accord de siège avec l'Unesco qui ne nous laisse aucune marge d'appréciation dès qu'une mission accréditée auprès de l'Unesco notifie la nomination d'un de ses membres".
    Mis en examen notamment pour "trafic d'influence, commerce illicite d'armes sans autorisation, abus de biens sociaux et abus de confiance", Pierre Falcone, dirigeant de la société de vente d'armes Brenco, est soupçonné d'avoir vendu en 1993 et 1994, sans avoir reçu d'autorisation officielle des autorités françaises, pour plus de 500 millions de dollars d'armes, venant d'Europe de l'Est, au régime angolais. Ce dont il affirme être innocent. D'importantes commissions auraient été versées en marge de ces ventes. Pierre Falcone, qui a été écroué durant un an dans le cadre de cette affaire, entre décembre 2000 et décembre 2001, avait été placé en détention provisoire le 14 octobre 2002 pour non-respect de son contrôle judiciaire, puis remis en liberté par décision de la cour d'appel le 25 octobre.
    Tf1, news, Mis en ligne le 20 septembre 2003
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    Le Parlement européen protège un Marchiani «persécuté»
    Arguments discutables pour le maintien de son immunité parlementaire.

    Ce serait donc un complot politique : «Il n'est pas exclu que les démarches pénales engagées par des éléments individuels, isolés, de l'appareil judiciaire français étaient sous-tendues par l'intention de porter atteinte à l'activité politique du député.» Voilà le coeur du rapport du député allemand Klaus-Heiner Lehne qui fonde l'avis de la commission juridique du parlement européen en faveur du maintien de l'immunité de Jean-Charles Marchiani (Libération d'hier).
    Partisan.
    C'est l'application du fumus persecutionis, ce principe selon lequel, écrit le rapporteur, «les députés du parlement européen doivent être protégés contre les poursuites à caractère tendancieux». Ce document, approuvé à l'unanimité par la commission juridique, ne s'attarde pas sur les faits. Rappelons que le juge Courroye soupçonne Jean-Charles Marchiani d'avoir détourné à son profit, et grâce à ses fonctions de haut fonctionnaire, environ 5,5 millions d'euros dans l'affaire Falcone ­ un trafic d'armes illicite ­ et dans deux dossiers de corruption présumée liée à des marchés.
    Dans ses requêtes, le magistrat expliquait son intention de placer Jean-Charles Marchiani en détention provisoire, pour prévenir tout risque de fuite et de concertation avec d'autres protagonistes de ces affaires. Après l'évocation du principe du fumus persecutionis, le rapporteur explique que des députés de la commission ont mis en avant, lors d'un débat le 8 juillet 2003, le caractère supposé partisan qui serait à l'origine de la demande du juge Courroye. «Ces députés ont notamment souligné qu'en l'état de la Constitution française, il aurait par exemple été possible de mener tout d'abord la procédure d'enquête à l'encontre de l'accusé et de demander ensuite seulement la levée de son immunité parlementaire. De plus, comme le montrent des articles parus dans la presse française, il semble que le juge chargé de l'affaire n'ait pas respecté le secret de l'instruction. Depuis, il a même été signalé que le juge d'instruction compétent faisait lui-même l'objet d'une enquête interne de l'administration judiciaire française pour faux en écriture», ajoute Klaus-Heiner Lehne.
    Pour l'anecdote, le rapport contient plusieurs erreurs formelles étonnantes, le juge d'instruction étant par exemple appelé «maître Philippe Courroye».
    En tout état de cause, les arguments de la commission correspondent à ceux répétés depuis des mois par Marchiani, dont les avocats ont adressé une note aux députés européens.
    «Transparence».
    Joint par Libération, Jean-Charles Marchiani estime «que la commission ne pouvait prendre une autre décision face à un juge falsificateur et menteur, et lorsque le droit est foulé aux pieds. Toutes les opérations visées ont été effectuées dans la plus grande transparence». L'allusion, par le rapport Lehne d'une «enquête interne de l'administration judiciaire française», est inspirée par la plainte déposée contre le juge Courroye par les avocats de Pierre Falcone, Charles Pasqua et Jean-Christophe Mitterrand, qui l'accusent d'avoir antidaté une ordonnance. La cour d'appel de Paris a considéré, en 2001 que l'erreur n'était que formelle.
    Libération, Par Fabrice TASSEL, vendredi 28 novembre 2003, p. 18
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    (mai 2004) Falcone continue de narguer la justice française
    Recherché dans l'affaire des ventes d'armes à l'Angola, il joue de son passeport diplomatique.

    Il est passé par ici. Il repassera par là. C'est désormais la petite chanson qui trottine dans la tête des policiers chargés de l'affaire des ventes d'armes à l'Angola. Depuis qu'il a obtenu de ce pays la charge de ministre plénipotentiaire auprès de l'Unesco, l'intermédiaire Pierre Falcone court, court et échappe régulièrement aux autorités judiciaires françaises, qui ont diffusé un mandat d'arrêt international à son encontre, courant janvier.

    Lundi 3 mai, l'homme d'affaires recherché a été reçu au palais de justice de Genève par la juge Christine Junod, pourtant chargée de l'entraide judiciaire avec la France. Il est reparti libre et sans souci pour Luanda. En revanche, mercredi, il a été interpellé à l'aéroport de Lisbonne, en provenance de Luanda, par la police des frontières, alors qu'il s'apprêtait à s'envoler le plus tranquillement du monde pour Londres. Mais le service des étrangers et des frontières (SEF), qui dépend du ministre de l'Intérieur, l'a laissé repartir, Falcone s'étant prévalu de son immunité diplomatique. «Il n'est resté que quelques heures sous le contrôle du SEF», a indiqué le porte-parole de l'ambassade de France à Lisbonne.

    L'affaire a provoqué un scandale politique au Portugal. Le groupe parlementaire socialiste a demandé des explications au gouvernement, vendredi, suivi par les principaux partis de gauche. Le PS et le Bloc de gauche (BE) s'interrogeant sur la détermination des autorités à combattre «la criminalité organisée» et sur leurs relations «périlleuses» avec l'Angola ­ ancienne colonie portugaise. Ces prises de position n'ont été suivies d'aucune réaction officielle. Seul le procureur de Lisbonne a indiqué qu'une «question disciplinaire» pourrait se poser «si une faute de procédure a été commise».

    «A l'aise».
    Il y a un mois, Pierre Falcone avait déjà fait sensation à Lisbonne, en répondant aux questions de l'hebdomadaire portugais Expresso. Invité à se rendre à Madrid la veille de l'entretien, le journaliste Daniel Ribero avait été informé du lieu de rendez-vous vingt minutes avant celui-ci. Falcone l'attendait à l'hôtel Ritz. Là, surprise : l'intermédiaire recherché, qui occupait une suite du palace, se promenait tranquillement dans l'établissement. «Il était très à l'aise et m'a dit que son mandat d'arrêt était illégal», explique le journaliste. Aucune enquête n'a été déclenchée à Madrid.

    L'arrivée de Falcone à Londres, après sa brève rétention à Lisbonne, n'est pas non plus passée inaperçue. Interpol Londres aurait avisé les autorités françaises ­ contrairement aux Portugais ­, mais sans l'arrêter non plus. Les avocats de Pierre Falcone, qui minimisent «l'incident» de Lisbonne, considèrent que le mandat diffusé dans l'espace Schengen est «inapplicable», compte tenu du statut diplomatique de leur client. Le statut de ministre plénipotentiaire à l'Unesco obtenu par le marchand d'armes, le 10 juin 2003, lui a en tout cas permis de tracer la route hors de France trois jours après avoir reçu ses documents diplomatiques, en septembre : le passeport de «ministre» angolais et une carte du ministère des Affaires étrangères français, signe de l'assentiment français.

    Discrets remous.
    Après avoir estimé, à la lecture des explications du ministère des Affaires étrangères, que l'immunité du marchand d'armes n'était que «partielle» ­ et qu'elle se limitait aux seuls actes accomplis dans le cadre de ses fonctions ­, le juge Philippe Courroye l'avait reconvoqué, sans succès, durant l'automne, puis avait délivré un mandat d'arrêt à son encontre. La désignation de Falcone au sein de l'Organisation des nations unies «pour l'éducation, la science et la culture» n'a provoqué que de discrets remous diplomatiques, et aucune réaction politique. Seule Catherine Deneuve a renoncé à son poste d'ambassadrice pour la préservation du patrimoine cinématographique. Falcone ne s'est, bien sûr, jamais présenté à l'Unesco. Et lorsqu'on téléphone à la délégation angolaise pour lui laisser un message, les employés incrédules répondent que c'est impossible.
    Libération, Par Karl LASKE, mardi 11 mai 2004, p. 18

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    (Mai 2004) Sulitzer, Attali, Mitterrand et les trafiquants d'armes

    APRÈS DEUX ANS et demi de travail, trois experts financiers ont remis au juge Courroye leur rapport sur les activités de l'homme d'affaires Pierre Falcone. Sous le coup d'un mandat d'arrêt international, couvert par l'immunité d'ambassadeur auprès de l'Unesco, Pierre Falcone et son associé, Arcady Gaydamak, en fuite en Israël, sont soupçonnés d'avoir orchestré un trafic d'armes avec l'Angola, ce qu'ils ont toujours nié. Cette expertise judiciaire dresse un tableau accablant de leurs activités en France. « Le système, écrivent les experts, a ainsi alimenté une économie parallèle échappant à la loi et à l'impôt et renchéri le coût des produits livrés au profit d'intérêts particuliers et au détriment de sociétés privées ou publiques. » Parmi ces « intérêts particuliers », ceux de Jean-Christophe Mitterrand, Paul-Loup Sulitzer, ou de Jacques Attali...

    Les sociétés n'étaient que des boîtes aux lettres.

    Evoquant « les difficultés rencontrées » au cours de leur mission, les experts déplorent d'abord « les destructions systématiques d'archives », « les réticences des différents intervenants », « leurs curieuses pertes de mémoire », et « l'incapacité dont certaines banques ont fait preuve pour fournir l'intégralité des informations réclamées ». Malgré ces entraves, les experts démontrent que la plupart des sociétés du groupe Brenco de Falcone et Gaydamak étaient en réalité des « boîtes aux lettres », dont le but était de masquer « les véritables donneurs d'ordre ». Ainsi, la société slovaque ZTS Osos, qui est censée avoir vendu le matériel militaire à l'Angola, était en réalité, selon les experts, entièrement pilotée par Falcone et Gaydamak. Entre 1993 et 1998, 4,233 milliards de francs d'armes auraient ainsi été vendues à l'Angola depuis Paris.

    Des intermédiaires très bien rémunérés.

    « Certes, le maître d'oeuvre incontesté, celui qui a imaginé, pensé, réalisé et dirigé ce système est M. Falcone, avec dans son ombre M. Arcadi Gaydamak... mais l'un et l'autre n'ont pu y parvenir qu'avec le concours de préposés et de tiers », écrivent les experts. Ces « actifs intermédiaires » étaient « rémunérés partiellement ou totalement en espèces et ne pouvaient ignorer le rôle qu'on leur faisait jouer ». Grâce à eux, Falcone et Gaydamak ont pu « combiner leurs intérêts personnels avec des enjeux nationaux ». Parmi ces intermédiaires, une dizaine au total, les trois experts citent Jacques Attali, ancien conseiller de François Mitterrand, et la propre secrétaire de Falcone, Isabelle Delubac. Son mari a d'ailleurs reconnu que Falcone avait remis 1,3 MF en espèces à sa femme pour « acheter son silence ».

    Un consultant... Jean-Christophe Mitterrand.

    Selon l'expertise, 14,3 MF ont été virés par Falcone à Jean-Christophe Mitterrand, en Suisse. Le fils aîné de l'ancien président a retiré 11,5 MF en espèces de ce compte pour alimenter celui d'Iwik Investissement, sa société de pêcherie en Mauritanie. « Consultant » pour Pierre Falcone, Jean-Christophe Mitterrand, selon les experts, « n'a pu expliquer la nature exacte des missions qui lui étaient confiées et qui pourraient justifier des rémunérations d'une telle importance », concluent-ils sèchement.

    Où l'on reparle de Paul-Loup Sulitzer.

    Engagé par Falcone pour « lui apprendre à gérer sa communication avec le monde des affaires et de la presse », l'écrivain Paul-Loup Sulitzer a d'abord cherché à minimiser son rôle. Selon les experts, ses déclarations sont émaillées « de contrevérités et d'incohérences ». Le romancier, après avoir « affirmé à plusieurs reprises ne pas détenir de comptes à l'étranger », a finalement « avoué avoir menti », et a reconnu des comptes aux Bahamas, à Zurich, à Nassau et à Genève. Il a aussi admis avoir effectué de 1995 à 1999 plusieurs dépôts en liquide (7 MF au total) et avoir procédé à « de nombreux transferts d'espèces par le biais de passeurs ». Il aurait reçu de Falcone 2,7 MF « au minimum ». Seule certitude des experts, « il est évident que M. Paul-Loup Sulitzer ne déclare pas l'intégralité de ses revenus au fisc français ni l'état réel de son patrimoine à l'ISF ».

    Où sont passés les 56,6 millions de dollars ?

    Au final, les trois experts ont tenté de comprendre où allait l'argent. S'ils sont parvenus à identifier certains bénéficiaires angolais, ils doivent admettre que 56,69 millions de dollars sont partis en direction « de bénéficiaires inconnus ». « Les cas de Charles Pasqua et de Jean-Charles Marchiani n'ont pas été étudiés dans cette expertise », précise aussi une source judiciaire. Les deux élus, candidats à leur propre succession au Parlement européen, sont soupçonnés d'avoir bénéficié de fonds mais protestent de leur innocence.
    Laurent Valdiguié, Le Parisien, 12 mai 2004, p. 17

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    L'Elysée pompier de l'affaire Falcone
    L'Angola exige une nouvelle fois le retrait des plaintes pour trafic d'armes. Et la France négocie.

    Comment étouffer l'affaire des ventes d'armes à l'Angola ?
    C'est l'actuel challenge diplomatico-judiciaire de Jacques Chirac. L'ex-ambassadeur Michel de Bonnecorse, actuel M. Afrique de l'Elysée, s'est rendu tout spécialement à Luanda, voilà trois semaines, pour trouver avec le président Eduardo Dos Santos des solutions à la crise diplomatique provoquée par les ennuis judiciaires du marchand d'armes français Pierre Falcone, devenu au fil des ans l'un des hommes de confiance du Président.

    Les grands services que Falcone a rendus à l'Angola (entre autres, déverser quelque 600 millions de dollars d'armement en pleine guerre civile) lui ont valu sa mise en cause à Paris pour «commerce illicite d'armes» en 2001. Les Angolais croyaient le protéger en le nommant, en septembre, ministre plénipotentiaire de l'Angola auprès de l'Unesco, avec l'assentiment du Quai d'Orsay. Ils ont déchanté en voyant le juge Philippe Courroye diffuser, en janvier, un mandat d'arrêt international à son encontre. En mai, Falcone a été brièvement interpellé, puis relâché, à Lisbonne par la police des frontières, mais il ne peut toujours pas mettre un pied à Paris où les autorités judiciaires estiment que son immunité diplomatique n'est que «partielle» (1).

    «Persécution».
    La colère du président Dos Santos s'est traduite récemment par des gestes très lourds qui ont provoqué la mission spéciale de Michel de Bonnecorse dans la capitale angolaise. Le nouvel ambassadeur de France, Guy Azaïs, présent à Luanda depuis le 17 février, n'avait toujours pas pu, mi-juin, déposer ses lettres de créance au ministère des Affaires étrangères angolais. L'ambassadeur de l'Angola à Paris avait été rappelé, quant à lui, à Luanda trois mois plus tôt. Bien plus grave : les autorités angolaises ont différé la signature avec Total de deux permis d'exploitation de gisements pétroliers, en off-shore profond, découverts en son temps par Elf-Aquitaine. Laissant entendre que l'américain Exxon-Mobil avait ses chances.

    Lors de la visite de Bonnecorse, les Angolais ont fait savoir une fois de plus à l'Elysée qu'ils ne comprenaient pas que «l'on persécute Falcone». Bonnecorse, lui, s'est déclaré «navré» du contentieux, mais déterminé à «retrouver la confiance». En signe de bonne volonté, les Angolais ont levé leur «embargo» diplomatique, autorisant l'ambassadeur français à fonctionner et rétablissant leur propre ambassadeur à Paris. L'envoyé spécial de l'Elysée a rassuré les autorités en estimant qu'«il n'y avait pas trafic d'armes», contrairement à ce que l'ex-ministre de la Défense socialiste Alain Richard avait jugé en déposant plainte pour commerce illicite il y a trois ans.

    Demande.
    En avril 2001, Dos Santos avait écrit à Chirac qu'il lui semblait «indispensable» que l'Etat français retire ses plaintes contre Falcone, «aussi bien pour fraude fiscale que pour vente illicite d'armes». Chirac avait alors gentiment répondu au président angolais qu'il transmettait ses observations au ministère français de la Justice. Bonnecorse a été confronté, fin juin, à la même demande d'un retrait des plaintes. Cette décision symbolique, attendue dans un délai assez court par les Angolais, serait a priori écartée par l'Elysée. Sans effet juridique sur la procédure, elle fait courir le risque d'être «déjugé par Courroye».

    Ainsi que l'a révélé la Lettre du Continent, le ministre des Affaires étrangères, Michel Barnier, devrait prendre le relais des négociations, fin juillet, à Luanda. Les Angolais espèrent, avant, un accord de principe. Les autorités angolaises soutiennent qu'elles n'étaient soumises à aucun embargo lors des livraisons d'armes, entre 1993 et 1995. Leur «ministre plénipotentiaire» prétend de son côté qu'il pouvait s'abstenir de déclarer ses marchés puisqu'il vendait de l'armement des pays de l'Est. En réalité, Falcone ne disposait d'aucune autorisation, et la diplomatie française jugeait impossible de livrer des armements au pouvoir, de relancer la guerre civile en plein processus de paix avec l'Unita. A l'époque, seule l'équipe de Charles Pasqua ­ très liée à Falcone ­ était informée des ventes d'armes à Dos Santos. L'ancien ministre de la Défense François Léotard s'est d'ailleurs indigné devant le juge Courroye de «l'intervention de l'intermédiaire français» et de cette «diplomatie parallèle». «Je ne peux pas imaginer qu'une autorité civile ou militaire du ministère de la Défense, qui aurait été informée d'une telle opération, manifestement illégale, ne le fasse pas savoir», a-t-il indiqué. La première note de la DGSE sur les ventes d'armes de Falcone date du 6 décembre 1995. Elle souligne alors «les grandes quantités de matériel militaire provenant de certains pays de l'Est et de la Russie» reçu par le pouvoir angolais, «par l'entremise d'un intermédiaire français non autorisé». Ce qui se passe de commentaire.

    Soutien.
    A minima, les négociations conduites par l'Elysée viseraient à rendre à Falcone sa liberté de circulation. Sur ce point, Falcone pourrait compter sur le soutien des autorités françaises qui ont annoncé aux Angolais leur détermination à «sortir de la crise avant la fin de l'été». Le marchand d'armes, qui a ignoré trois convocations du juge Courroye avant d'être recherché, devra d'abord se rendre au palais de justice. Si le juge accepte le principe d'un nouveau contrôle judiciaire, il pourra peut-être ensuite aller visiter l'Unesco.
    (1) En vertu de la convention de Vienne, le marchand d'armes ayant la nationalité de l'Etat accréditaire ­ la France ­, sa protection diplomatique se limite aux seuls actes liés à sa fonction.
    Par Karl LASKE, jeudi 08 juillet 2004 (Liberation - 06:00)

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    Un marchand d'armes très protégé

    1993. Pierre Falcone est introduit par Jean-Christophe Mitterrand auprès des autorités angolaises qui lui commandent dans un premier temps 463 millions de dollars d'armement. Au ministère de l'Intérieur, le préfet Marchiani est tenu informé.

    1996. Lors d'une perquisition à Paris, les services fiscaux découvrent l'ampleur du trafic ­ qui inclut des mines antipersonnel. Le fisc réclame à l'intermédiaire un redressement de 2,2 milliards de francs. Falcone fait intervenir Jacques Attali auprès du Quai d'Orsay.

    2000. Le juge Courroye saisit le dossier fiscal chez l'avocat de Falcone. L'enquête judiciaire démarre. Ecroué en décembre, le marchand d'armes est remis en liberté un an plus tard. L'office d'armement du ministère de l'Intérieur, Jean-Christophe Mitterrand et Marchiani sont mis en cause.

    2003. Falcone devient ministre plénipotentiaire de l'Angola à l'Unesco. Il part pour Londres, après avoir été inscrit, sans difficulté, sur la liste diplomatique du Quai d'Orsay.
    jeudi 08 juillet 2004 (Liberation - 06:00)

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    Pierre Falcone attaque les éditions Denoël pour diffamation

    PARIS (AP) - L'homme d'affaires Pierre Falcone a porté plainte pour diffamation contre les éditions Denoël et le journaliste Karl Laske, respectivement éditeur et auteur du livre "Des coffres si bien garnis - Enquête sur les serviteurs de l'Etat-voyou", a annoncé mercredi Denoël.

    M. Falcone, mis en examen pour commerce illicite d'armes vers l'Angola et visé par un mandat d'arrêt international, "estime son honneur et sa considération mis en cause par les passages le concernant" dans ce livre publié en mai dernier, précise l'éditeur dans un communiqué.

    M. Falcone a engagé mardi dernier ces poursuites devant le tribunal de grande instance de Paris, réclamant 100.000 euros de dommages et intérêts, ainsi qu'une dizaine d'insertions judiciaires dans différents journaux, selon Denoël. Les éditeurs se disent sûrs de leur "bon droit", accusant M. Falcone de vouloir faire régner "l'omerta autour de lui". AP
    yahoo.fr, actualités, mercredi 4 aout 2004, 15h18

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    (Juin 2005) Affaire Falcone : un ancien responsable de Paribas en examen

    Au cours de ses investigations sur 1'affaire des ventes d'armes à l' Angola, le juge Philippe Courrroye s'est intéressé à la banque Paribas. Un ancien responsable à de cet établissement a récemment été mis en examen pour « recel de trafic d'influence ».
    André Lévy-Lang, président du directoire de Paribas au moment des faits, a pour sa part été longuement entendu à deux reprises, comme témoin par les policiers puis par le magistrat instructeur. Plusieurs faits saillants ressortent de la procédure.

    Paribas, financier de Falcone et de Gaydamak.
    La relation entre Paribas et les marchands d'armes Pierre Falcone et Arcadi Gaydamak remonte au 12 décembre 1994. La société ZTS Osos, à travers laquelle les deux associés ont monté la fourniture de matériel militaire à 1'Angola, obtient une ligne de crédit de 30 millions de dollars.
    « Après avoir sollicité plusieurs banques, la solution est venue du département compensation de Paribas avec la mise en place d'importants crédits gagés sur la livraison future de pétrole angolais », résument les policiers dans un rapport de synthèse.

    L'enquête du juge Courroye a établi qu'entre 1995 et 1997, Paribas a financé à hauteur de 573 millions de dollars les ventes d'armes effectuées par la société ZTS Osos à l'Angola.

    La responsabilité des cadres de Paribas.
    Le département compensation de Paribas dirigé à l'époque par Alain Bernard et son adjoint Jean-Didier Maille s'est chargé du montage. Les deux hommes sont suspectés d'avoir perçu 30 millions de dollars de commissions sur des comptes à l'étranger.
    Victime d'un accident de santé en 1997, Alain Bernard ne peut être entendu. Jean-Didier Maille, en revanche, a été mis en examen le 23 mars dernier pour « recel de trafic d'influence ».

    Au sujet de sommes qu'il aurait reçues sur un compte luxembourgeois, il a expliqué que celui-ci « servait de passage pour payer des commissions aux décideurs angolais.
    Nous mettions en place des financements (comme ceux en faveur de Pierre Falcone, NDLR) qui étaient gagés sur des ventes futures de pétrole (...) Il fallait donc payer des commissions aux personnes qui étaient chargées d'organiser les ventes de pétrole. C'étaient des commissions occultes, donc elles devaient passer par un circuit occulte ». Selon Jean-Didier Maille, Alain Bernard et Pierre Falcone s'étaient« mis d'accord» sur ce système.

    La responsabilité de Paribas.
    Sur procès-verbal, Jean-Didier Maille a affirmé que « la direction de Paribas avait connaissance des activités de Alain Bernard (...) Tout le monde savait qu'il payait des commissions (...) On appelait ces activités : les affaires spéciales. »

    Les déclarations de l'ancien président de Paribas
    A la tête du directoire de Paribas de 1991 à 1999, André Levy-Lang a été interrogé une première fois par la brigade financière en février dernier. Au sujet des 30 millions de dollars perçus par les anciens cadres de la banque, il s'est dit «furieux et scandalisé de découvrir ces chiffres» dont il a assuré ne rien savoir. Le 5 avril, lors d'un nouvel interrogatoire, cette fois devant le juge Courroye, il a vigoureusement démenti les accusations de Jean-Didier Maille.
    Pour lui, « le paiement de commissions était contraire à la politique de la banque ».
    Quant aux relations de Paribas avec Falcone, il a dit ne pas se souvenir « avoir été tenu au courant de cette opération de vente d'armes à destination de l'Angola ». « Je savais que la banque finançait des opérations d'exportation de pétrole de l'Agola en contrepartie d'importations à destination de ce pays, a expliqué André Levy-Lang. Mais pour cette opération précise, la question ne m'a pas été posée.
    Si on était venu me voir pour m'informer de ce projet portant sur des achats d'armes j'aurai exigé que l'on vérifie la conformité de cette opération avec la position politique française et les engagements internationaux (...) Au regard de ce que je sais, je n'aurais donc pas donné mon aval».

    Paribas a pourtant financé les activités de Pierre Falcone et Arcadi Gaydamak quand les ventes d'armes à l'Angola étaient sous embargo de l'ONU. Une source judiciaire indique que la banque pourrait être poursuivie en tant que personne morale.

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    Pierre Falcone revient comme il veut, quand il veut La justice a levé hier les deux mandats d’arrêt qui visaient l’homme d’affaires.
    Par Renaud Lecadre, Libération, QUOTIDIEN : jeudi 4 octobre 2007, p. 10

    La justice française, c’est parfois simple comme un coup de fil.
    Pierre Falcone, homme d’affaires, poursuivi dans deux scandales politico-financiers, a obtenu hier la levée des mandats d’arrêt internationaux pesant sur lui. Mis en examen dans deux dossiers instruits à Paris et visant les réseaux Pasqua (Sofremi et Angolagate), il avait pris la fuite à l’étranger fin 2001, après un an de détention préventive. Protégé par un passeport diplomatique de l’Angola auprès de l’Unesco (de pure complaisance, le siège de l’Unesco étant à Paris), Falcone était de fait «inarrêtable».

    Galaxie.
    A l’approche du procès Sofremi (société d’exportation du ministère de l’Intérieur ayant multiplié les commissions occultes au profit de la galaxie Pasqua), prévu lundi ( Libération d’hier), Falcone avait envoyé quelques signaux : d’accord pour comparaître en correctionnelle, mais pas menottes aux poignets.
    Dans un Etat de droit, il n’est pas d’usage de négocier à l’avance une décision judiciaire, seul un tribunal pouvant ordonner la levée de son mandat d’arrêt. «Mais on peut toujours demander au parquet quelles seront ses réquisitions», souligne un magistrat. L’avis du parquet n’étant que facultatif, le cas Falcone était censé relever de l’appréciation souveraine de juges du siège. Hier, dans la matinée le tribunal correctionnel a d’abord levé son mandat d’arrêt dans l’affaire Sofremi, moyennant une caution de 300 000 euros.
    Le procès au fond étant imminent, pourquoi pas : tout citoyen a droit à un procès équitable, le parquet faisant assaut de civilité en estimant que l’équité commande que Falcone puisse comparaître libre. Croyant sauver l’honneur, il s’est contenté «d’émettre les doutes les plus sérieux sur les déclarations d’intention de monsieur Falcone», qui n’était évidemment pas présent hier à l’audience. Il faut donc croire sur parole ses avocats - «il a recruté la moitié du barreau», ironise un confrère - qui font miroiter sa présence effective, lundi au procès Sofremi.
    Justice bananière.
    Car Falcone exigeait une autre garantie. C’est la deuxième couche, le tribunal correctionnel levant l’après-midi l’autre mandat d’arrêt dans l’affaire Angolagate. Pour le coup, on nage en pleine justice bananière. Ce procès-là n’est pas prévu avant fin 2008, le président du tribunal n’est pas encore formellement désigné, plusieurs avocats au dossier (représentant la cinquantaine de prévenus et parties civiles) n’ayant même pas reçu l’ordonnance de renvoi en correctionnelle. Ce tribunal a pourtant siégé pour, comme à la parade, annuler le second mandat d’arrêt.
    Seule explication rationnelle : la raison d’Etat. Nicolas Sarkozy doit s’envoler pour l’Angola début 2008. La semaine dernière à l’ONU, il célébrait la fin des «mauvaises relations entre la France et l’Angola» avec son homologue Dos Santos. Lequel n’avait qu’une seule exigence : que la justice française arrête de chercher des poux à son «ambassadeur» de luxe.
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    Pierre Pasqua et Pierre Falcone condamnés à de la prison ferme
    LEMONDE.FR avec AFP | 11.12.07 | 15h03 • Mis à jour le 11.12.07 | 16h35

    Pierre Pasqua, fils unique de l'ancien ministre de l'intérieur Charles Pasqua, a été condamné, mardi 11 décembre, par le tribunal correctionnel de Paris à dix-huit mois de prison ferme (deux ans d'emprisonnement dont six mois avec sursis), et l'homme d'affaires Pierre Falcone à un an ferme (deux ans d'emprisonnement dont un avec sursis) dans le dossier des commissions occultes versées par la Sofremi dans les années 1990. Pierre Pasqua n'était pas présent à l'audience, mais son avocat a déjà fait savoir qu'il comptait faire appel.
    La Sofremi, qui dépendait de la Place Beauvau, était chargée d'aider les entreprises françaises désireuses de vendre à l'étranger du matériel de police. Les commissions indues versées par la Sofremi portaient sur quatre marchés, au Koweït, en Colombie, en Argentine et au Brésil.
    L'argent versé en échange de l'obtention de ces contrats transitait principalement par l'homme d'affaires Pierre Falcone ou encore Etienne Leandri, un proche de Charles Pasqua mort en 1995, via des sociétés écrans dans des paradis fiscaux.
    Au cours de l'une de ses auditions devant le juge, Bernard Dubois, l'ex-PDG de la Sofremi, a d'ailleurs assuré que les commissions étaient "un des moyens de financement du système de Charles Pasqua".
    DEUX ANCIENS DIRIGEANTS SANCTIONNÉS
    Le tribunal a par ailleurs sanctionné deux anciens dirigeants de la Sofremi. L'ex-PDG Bernard Dubois, 73 ans, a été condamné pour abus de biens sociaux à trois ans avec sursis et 100 000 euros d'amende. L'ancien directeur général adjoint Bernard Poussier, 62 ans, a écopé de trois ans dont un an avec sursis et 300 000 euros d'amende. L'ancien conseiller diplomatique de Charles Pasqua, Bernard Guillet, 62 ans, a été condamné à six mois avec sursis et 50 000 euros d'amende.
    Enfin, le tribunal a relaxé l'ancien directeur administratif financier de la Sofremi, Nicolas Maroslavac, ainsi que l'ancien préfet du Var Jean-Charles Marchiani et les hommes d'affaires libanais Iskandar et Akram Safa.
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    "Angolagate" : le ministre français de la Défense "blanchit" Pierre Falcone
    Par Afrik.com Afrik - Vendredi 18 juillet, 18h53

    Pierre Falcone, au cœur de l’affaire des ventes d’armes à l’Angola, ne serait coupable d’aucun délit, selon le ministre français de la Défense Hervé Morin. "Il résulte de l’examen du dossier de mon ministère à la lumière de vos observations, qu’en l’absence de transit par le territoire français, la législation relative aux opérations de vente d’armes et de munitions (...) ne s’appliquait pas aux dates retenus par le dossier de l’instruction à l’activité exercée par M. Pierre Falcone", écrit Hervé Morin dans sa lettre datée du 11 juillet, publiée par le magazine Le Point.
    Hervé Morin répondait à une requête des avocats de Pierre Falcone. Ils estiment en effet que la plainte de la France, au cœur de la procédure judiciaire dont fait l’objet l’homme d’affaires, est infondée.
    En visite officielle en Angola le 23 mai dernier, le président français Nicolas Sarkozy avait assuré à son homologue Eduardo dos Santos, impliqué dans le dossier, qu’il souhaitait « tourner la page des malentendus du passé ».
    Le procès de l’Angolagate, privé désormais de toute substance, s’ouvrira néanmoins en octobre prochain.
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    AFP, Mise a jour : 30 avril 2011 Angolagate: Pierre Falcone est sorti de prison

    L'homme d'affaires Pierre Falcone, condamné vendredi dans l'affaire de l'Angolagate à une peine lui permettant de sortir de prison, a quitté la maison d'arrêt de Fleury-Merogis (Essonne) en fin de journée, a-t-on appris auprès d'un de ses avocats, Me Pierre-François Veil.
    Interrogé par l'AFP pour savoir si M. Falcone était bien sorti de prison, comme l'affirmait Le Parisien, Me Veil a répondu: "oui". Il a précisé qu'il était sorti "à 18H30".
    Une source proche du dossier avait précédemment confirmé la sortie de prison de M. Falcone "en fin de journée".
    "Pierre Falcone va maintenant retrouver sa famille", a indiqué Me Veil.
    L'homme d'affaires français, âgé de 57 ans, était incarcéré depuis le 27 octobre 2009.
    Il a été condamné vendredi par la cour d'appel de Paris à deux mois et demi de prison et 375.000 euros d'amende pour abus de biens sociaux dans l'affaire de l'Angolagate.
    L'accusation principale de trafic d'armes n'a été retenue ni contre lui, ni contre son partenaire Arcadi Gaydamak, homme d'affaires franco-israélien d'origine russe, en fuite. La cour a reconnu que les deux hommes avaient été "mandatés" par l'Etat angolais pour lui procurer dans les années 90 des armes destinées à lutter contre les rebelles de l'Unita.
    Dans son arrêt, la cour d'appel s'est prononcée pour "la confusion totale entre la peine prononcée (vendredi) et les peines de deux ans d'emprisonnement dont un avec sursis et 375.000 euros d'amende prononcées par la chambre correctionnelle de la cour d'appel de Paris le 29 mai 2009 (détournements de fonds au détriment de la Sofremi, une société vendant du matériel de sécurité à l'étranger et placée sous l'autorité du ministère de l'Intérieur, ndlr), et les peines de 30 mois d'emprisonnement et 375.000 euros d'amende prononcées par la chambre correctionnelle de la cour d'appel de Paris le 6 décembre 2010" (pour fraude fiscale, ndlr).
    La cour a constaté "que la totalité de la peine est purgée à ce jour" et a "dit n'y avoir lieu à maintien en détention".
    En première instance, en octobre 2009, Pierre Falcone avait été condamné à six ans ferme et immédiatement écroué.
    A l'ouverture du procès en appel, le 19 janvier, il disait lui-même avoir passé "27 mois" en prison et contestait "tous les faits" qui lui étaient reprochés.
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